Échos de la conférence de presse du cardinal André Vingt-Trois : « C’est un acte particulièrement courageux »

Lundi 11 février 2013

C’est face à des journalistes sur le qui-vive que la cardinal André Vingt-Trois a fait son entrée, lundi à 15 heures, dans une salle du siège de la Conférence des évêques de France, accompagné de Mgr Laurent Ulrich, évêque de Lille, Mgr Hippolyte Simon, évêque de Clermont, et Mgr Bernard Podvin, porte-parole de l’épiscopat français.

« Cet événement, nous l’avons appris ce matin. Il va sans dire que nous n’avions absolument pas programmé cette rencontre », a assuré ce dernier, avant de laisser la parole à l’archevêque de Paris.

« [La décision de Benoît XVI] a quelque chose d’exceptionnel puisqu’un tel événement ne s’était pas produit dans l’Église depuis le XVe siècle, a commenté Mgr Vingt-Trois. (…) En prenant cette décision, le pape a brisé un tabou  : il a rompu avec plusieurs siècles de pratique pour manifester qu’il était non seulement légitime mais probablement utile que le pape puisse renoncer à sa charge et se retirer. Ça n’est évidemment pas une surprise puisqu’il l’avait annoncé il y a deux ans et demi dans son livre d’entretiens Lumière du monde. À la question « On peut donc imaginer une situation dans laquelle vous jugeriez opportun un retrait du pape ? », Benoît XVI avait répondu : « Oui, quand un pape en vient à reconnaître en toute clarté que physiquement, psychiquement et spirituellement, il ne peut plus assumer la charge de son ministère. Alors il a le droit et, selon les circonstances, le devoir de se retirer. » »

Après avoir lu la renonciation du pape largement diffusée dans les médias depuis lundi en fin de matinée, Mgr Vingt-Trois a ajouté : « Il s’agit d’une décision lucide, ce dont les évêques de France qui ont pu rencontrer le pape au cours des mois de septembre et novembre derniers ne doutent pas un instant. Ils ont pu expérimenter directement dans le dialogue qu’ils ont eu avec lui que sa lucidité et son acuité intellectuelle étaient intactes, de même que sa mémoire puisqu’il parlait français sans aucune difficulté. (…) Mais nous avons pu constater aussi que son endurance physique était très éprouvée, sa capacité de locomotion et sa capacité d’expression [également]. (…) Tous ces éléments, analysés dans la lucidité intellectuelle qui est la sienne, l’ont conduit à prendre la décision qu’il a prise et que je considère comme un acte particulièrement courageux. »

Évoquant l’événement d’un point de vue plus national, l’archevêque de Paris a mis en avant « les liens tout à fait étroits [que Benoît XVI] entretenait avec la culture française ». « Nous perdons un ami de la France et un ami très cher de l’Église de France », a-t-il pousuivi, avant de rendre hommage appuyé aux qualités éminentes que Joseph Ratzinger a déployé tout au long de sa vie. D’abord comme théologien, faisant « de l’articulation de la foi et de la raison, un thème prioritaire de son investissement pédagogique comme pape » ; comme artisan de l’unité de l’Église ensuite, afin de tenter de « faire disparaître la faille, la rupture d’unité qui s’est produite entre les successeurs de Mgr Lefebvre (…) et l’Église catholique », faisant « tout ce qu’il a pu » pour « rendre possible une réconciliation » ; comme promoteur de l’engagement social des chrétiens enfin, notamment à travers l’encyclique « Caritas in veritate ». « Cet ensemble considérable, en quelques années, rappelle simplement la fécondité intellectuelle du travail de Benoît XVI », a conclu Mgr Vingt-Trois, citant en guise d’exemple, le Jésus de Nazareth, dont le dernier volume a récemment été publié.

Interrogé en fin de conférence de presse sur la façon dont l’Église va vivre le temps particulier qui fait suite à la renonciation du pape, le Cardinal a répondu en quelques mots : « Nous allons inviter les membres de nos diocèses à prier, à rendre grâce à Dieu pour le ministère de Benoît XVI, à confier l’Église et son avenir à la miséricorde de Dieu, à l’influence de l’Esprit saint qui éclairera ceux qui auront à élire le nouveau pape. »

Pierre-Louis Lensel

Benoît XVI