Homélie de Mgr André Vingt-Trois – Messe en la basilique de l’Annonciation de Nazareth

Nazareth - mardi 13 février 2007

La Messe a été concélébrée par Mgr Vingt-Trois, Mgr Chacour et Mgr Marcuzzo dont le mot d’accueil a dessiné le rôle et le sort des chrétiens de Terre Sainte tout en invitant les chrétiens du monde entier à venir aux sources de leur foi.

La messe était célébrée dans la basilique supérieure construite au-dessus de l’église qui abrite la grotte de l’Annonciation. C’est une étape du pèlerinage-découverte sous la présidence de Mgr André Vingt-Trois qui a eu lieu du lundi 12 au jeudi 15 février 2007. 588 personnes y ont pris part dont une soixantaine de prêtres et une trentaine de journalistes. Consultez également le compte-rendu de ce pèlerinage-découverte en Terre-Sainte.

Chers frères et soeurs,

Je vous disais hier que notre participation à l’Eucharistie serait en même temps le sommet de nos journées et la lumière à partir de laquelle nous serions invités à comprendre les événements que nous aurons vécus, les découvertes que nous avons faites. Aujourd’hui je voudrais profiter de cette célébration à Nazareth et de la méditation du mystère de l’Annonciation pour vous inviter à entrer, peut-être plus profondément, dans l’intelligence des signes.

Pour faire cela facilement, je m’inspire du lieu même où nous nous trouvons, cette magnifique basilique supérieure sous laquelle, nous le savons, se trouve le coeur, le lieu central, la maison de l’Annonciation. Nous avons besoin d’un espace liturgique suffisamment grand pour célébrer ensemble, c’est ce que nous voyons tandis que nous célébrons la Messe, mais nous ne pouvons nous priver totalement du fondement qui reste ici invisible. Nous l’avons aperçu tout à l’heure en passant devant la grotte. Pour voir que le coeur spirituel de ce lieu n’est pas apparent à nos yeux il est comme enfoui dans le soubassement. Souvenons-nous aussi que le chemin que nous avons parcouru depuis la fontaine de la Vierge jusqu’ici était, si nous en croyons les traditions qui nous ont été présentées, le chemin ordinaire par lequel Marie, chaque jour, allait faire sa provision d’eau et redescendait chez elle. Une activité quotidienne pour les femmes de Nazareth, dont personne ne pouvait s’imaginer qu’elle puisse être un moment décisif de l’histoire de l’humanité, pas plus d’ailleurs que la rencontre de la Samaritaine avec Jésus au bord du puits. Dans la relation ainsi nouée, sans éclat, sans relief spectaculaire, tout le message est intérieur et, pourtant, tout le dynamisme du projet de Dieu pénètre le coeur de Marie. Nous connaissons cela puisque, selon la parole de Jésus dans l’évangile, ses disciples ne sont pas une masse impressionnante, mais ils sont le ferment, le levain, le sel, la lumière. Notre frère nous le rappelait tout à l’heure des disciples du Christ en cette terre, en cette Terre Sainte.

Ce n’est pas la quantité qui donne la force, c’est la communion au Christ ressuscité. Ce qui va transformer, ce qui peut transformer, ce qui a déjà transformé le visage de l’humanité à travers le temps, c’est la façon dont le message d’amour du Christ a pu pénétrer peu à peu les cultures humaines, rejoindre ce qu’il y a de meilleur dans le coeur de l’homme, susciter le désir de travailler à la réconciliation et à la paix. Nous-mêmes, chrétiens de France, voici que depuis peu des gens bien intentionnés s’inquiètent pour nous : nous aurions franchi la barre fatidique des 50% et nous pourrions devenir une espèce en voie de disparition. Dès lors, tous nos amis qui veillent à notre chevet pour nous encourager dans ces moments difficiles, caressent nos mains et sont prêts à nous dispenser les soins palliatifs indispensables pour que cela finisse en douceur. Alors je voudrais les inviter à venir ici rencontrer les communautés chrétiennes de Terre Sainte, les différentes Eglises traditionnelles depuis l’Antiquité. Ces Eglises pourront raconter leur histoire, leurs périodes de grande prospérité, leurs périodes difficiles et leur faire constater qu’elles sont toujours vivantes, et bien vivantes, et pas seulement vivantes ici mais vivantes aussi dans le reste du monde.

Nous avons un peu mieux appris à être le trésor enfoui ; nous avons appris que dans des sociétés un peu molles les gens qui savent en quoi ils croient, qui essayent de le vivre et surtout qui essayent de le dire, peuvent changer quelque chose, peut-être pas tout de suite mais un jour sûrement.

C’est donc pleins d’action de grâce que je vous invite à contempler le trésor caché, trésor caché sous notre espace liturgique, le trésor caché dans les rues de Nazareth, dans le cheminement quotidien des hommes et des femmes de ce pays, trésor caché de notre Eglise chrétienne du Moyen-Orient, dans le témoignage qu’elle rend à la foi, à la charité et surtout à l’espérance.

Amen.

+ André Vingt-Trois
Archevêque de Paris

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