Homélie du cardinal André Vingt-Trois – Messe à l’occasion du Conseil international de la JOC

Basilique Saint-Denis (diocèse de Saint-Denis) - dimanche 22 juin 2008

Messe à l’occasion du Conseil international de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne (JOC).

Evangile selon Saint Matthieu au chapitre 10, versets 26-33

Homélie du Cardinal André Vingt-Trois

Frères et sœurs, chers amis,

Nous venons d’entendre comment le Christ prépare ses disciples à la mission qu’il va leur confier : annoncer à tous les hommes la bonne nouvelle du salut. Les caractéristiques de cette préparation, telle qu’elle nous est présentée aujourd’hui, sont simples : il faut faire passer ce qui est caché au grand jour. « Rien de ce qui est caché ne restera caché, tout sera mis au grand jour ». Ce qui est ainsi à mettre au jour est la relation qui unit les apôtres à la personne du Christ et la mission qu’il leur a confiée.

Vous vous rappelez certainement comment, après la mort de Jésus, les apôtres se sont rassemblés dans une pièce où ils se sont barricadés parce qu’ils avaient peur qu’il leur arrive la même chose qu’au Christ.
Le jour de la Pentecôte, la puissance de l’Esprit-Saint est descendue sur chacun d’eux et le premier signe de cette puissance fut qu’ils sont allés ouvrir les portes de la maison de la pièce où ils étaient et qu’ils sont passés de l’intérieur à l’extérieur.
Ainsi s’accomplissait ce que Jésus avait annoncé : « Ce qui est caché passe au grand jour ».

Mais nous, qu’avons-nous à cacher ? Que pourrions-nous dissimuler aux yeux des hommes ? Sinon, précisément, le fait que notre manière de conduire notre vie ne vient pas seulement de la sagesse commune mais vient de notre foi en la Parole de Dieu et de notre effort pour mettre cette foi en pratique.
Vous êtes venus ce matin pour célébrer l’eucharistie. Pour vous qui êtes rassemblés dans le comité international de la JOC, il n’y avait pas grand-chose à cacher : vous saviez où vous alliez et chacun savait où allaient les autres. Mais vous qui avez quitté votre logement, qui êtes sortis pour venir jusqu’ici, qui sait pourquoi vous vous êtes levés ?
Quelles questions vos voisins peuvent-ils se poser ? Où va-t-il ? Où va-t-elle ? Mais surtout, car ils peuvent bien deviner que vous allez à quelques prières le dimanche, qu’est-ce que cela change dans votre manière de vivre ? Pour nous, passer du secret au public, montrer ce qui est caché, ce n’est pas porter une banderole ou une bannière où serait écrit : « Je suis chrétien » ; c’est laisser apparaître la parole du Christ à travers notre manière de vivre.
Parce que nous ne sommes pas entourés par une foule d’hommes et de femmes convaincus de la mission du Christ, parce que la manière dont le Christ nous appelle à vivre ne correspond pas aux critères de notre société, si nous laissons paraître ce que nous sommes, alors nous ne pouvons pas éviter de déclencher l’hostilité.
Le prophète Jérémie nous le rappelait tout à l’heure : celui qui est prophète est pourchassé, quelquefois persécuté comme Jérémie le sera, quelquefois encore mis à mort comme le sera Jésus et comme, dans vos différents pays, des hommes et des femmes ont été mis à mort, non pas seulement parce qu’ils étaient chrétiens mais surtout parce que leur foi au Christ les conduisait à vivre selon un certain ordre de valeur.
Celui qui croit au Christ ne peut pas accepter que l’homme soit écrasé, méprisé et détruit. Celui qui combat pour que la liberté, la justice et le respect de l’homme règnent dans la société va nécessairement au devant de l’hostilité.

C’est pourquoi, dans ce combat, il n’y a pas des foules de volontaires. Personne n’aime être mal vu, être mal jugé, être maltraité et à plus forte raison être persécuté. Les chrétiens ne sont pas des masochistes qui cherchent à souffrir pour le plaisir.
Si la souffrance vient dans leur vie, ils doivent espérer que c’est par fidélité au Christ. Jésus, en ouvrant ce chemin devant ses apôtres, leur annonce qu’ils sont tous et chacun sous la protection de l’amour de Dieu.
Le risque de ne pas être compris, d’être combattus, d’être rejetés, il est humainement normal que nous en ayons peur, et la parole du Christ à ses apôtres vise à renforcer notre confiance : si nous vivons selon les commandements de Dieu, si nous essayons de mettre sa Parole en pratique, non seulement dans le secret de notre famille, non seulement dans le secret de notre logement, mais aussi dans tous les domaines de notre vie, dans tous les secteurs de notre vie humaine, qu’il s’agisse de la famille, du travail, de la société, qu’il s’agisse des loisirs, dans toutes les activités humaines auxquelles nous participons et qui, toutes, peuvent être illuminées par la Parole du Christ, si donc nous mettons cette Parole en pratique, si nous essayons de modeler notre vie, de l’orienter selon l’appel de Dieu, alors nous savons que notre qualité de chrétien ne restera pas cachée.
Elle paraîtra au grand jour ; elle pourra gêner certains, elle suscitera la moquerie, l’hostilité, la violence peut-être ; mais, dans tout cela, nous savons aussi que Dieu ne nous abandonne pas, pas plus qu’il n’abandonne les oiseaux du ciel ni les lys des champs.

C’est donc avec confiance que nous recevons du Christ la mission de faire passer au jour ce qui est caché, de manifester devant tous que nous croyons que Dieu, Père, Fils et Esprit Saint, veut le bien de l’homme. Amen.

+André cardinal Vingt-Trois, Archevêque de Paris

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