Accueil des réfugiés : accord humanitaire entre les Églises et l’État

Un protocole d’accord intitulé « Opération d’accueil solidaire de réfugiés en provenance du Liban » vient d’être signé entre l’État et un groupe œcuménique, dont des catholiques et des protestants. Plus simplement, il s’agit de créer un couloir humanitaire vers la France pour des exilés dont la plupart sont d’origine syrienne

Un protocole d’accord intitulé « Opération d’accueil solidaire de réfugiés en provenance du Liban » vient d’être signé entre l’État et un groupe œcuménique. Aboutissement de longues négociations et inauguration d’un projet innovant : un protocole d’accord a enfin été signé, mardi 14 mars, pour la mise en œuvre d’une « Opération d’accueil solidaire de réfugiés en provenance du Liban ».

Plus simplement, il s’agit de créer un couloir humanitaire vers la France pour des exilés dont la plupart sont d’origine syrienne. Un tel dispositif ne se met pas en place sans conditions, sans vérification et donc sans discussion entre les partenaires et avec l’État. Les pourparlers, entamés dans le courant de l’année 2016, ont réuni autour de la table la communauté Sant’Egidio, porteuse de l’initiative, la Fédération protestante de France, la Fédération de l’Entraide protestante (FEP), la Conférence des évêques de France, le Secours catholique-Caritas France ainsi que le ministère de l’Intérieur et le ministère des Affaires étrangères. Ces négociations avaient débuté avec Bernard Cazeneuve, avant qu’il ne devienne Premier ministre. Après avoir soulevé d’intenses espoirs et connu des phases d’hésitation, elles ont enfin donné lieu à un engagement formalisé, dans un cadre défini. Le modèle italien n’a pas été inutile. Car c’est d’abord dans la péninsule que Sant’Egidio, qui réunit des laïcs catholiques autour de la prière, a lancé le projet, désormais devenu pilote. Devant l’afflux de migrants et l’impossibilité d’agir seuls, les partenaires œcuméniques se sont regroupés sous son égide et ont sollicité l’État. « Nous avions un sentiment d’impuissance face à l’arrivée presque quotidienne de tous ces migrants, vifs ou morts, car il y a aussi des cadavres. On peut dire que l’idée est née à Lampedusa, après le naufrage du 3 octobre 2013 qui a fait autour de 400 morts », résume Luca Negro, président de la Fédération protestante d’Italie.

La communauté chrétienne dans son ensemble n’a pas voulu rester sans réaction et a réfléchi à une implication pratique. « Comment faire pour aider les réfugiés, les sauver ? Pour éviter ces voyages de la mort dans des embarcations de fortune ? Nous avons eu l’idée de couloirs humanitaires sur le critère de la vulnérabilité », explique Valérie Régnier, présidente de Sant’Egidio France. Ainsi, un transport aérien sécurisé a pu être mis en place au départ du Liban, où les camps de réfugiés sont surpeuplés. Le protocole français emprunte la même voie.

Une double sécurité
La priorité est donnée aux personnes les plus fragiles : victimes de persécutions, violences ou tortures, femmes seules avec ou sans enfants, personnes âgées, malades ou porteuses de handicap… et à leur famille, sans considération religieuse, ethnique ou politique. Les frais de leur voyage sont entièrement supportés par les Églises et associations partenaires, de même que leur prise en charge à l’arrivée, l’État s’en tenant à un rôle administratif. En France, ce dernier a donné son accord pour l’accueil de 500 migrants dans les 18 prochains mois. À ce premier stade, ils auront le statut de demandeurs d’asile. Plusieurs associations confient regretter d’avoir dû réviser leurs prétentions à la baisse lors des négociations avec le gouvernement. En termes de nombre mais aussi de statut : étudier d’emblée chaque situation en vue d’octroyer (ou non) un statut de réfugié aurait simplifié les démarches. Pour autant, la volonté de construire est toujours présente.
« Commençons par ce que nous pouvons faire dans le cadre de ce protocole. De la réussite du processus dépend son élargissement potentiel », affirme Laurent Giovannoni, du département accueil et droits des étrangers au Secours catholique. L’entrée dans le dispositif des personnes vulnérables se fait sur la base de recommandations adressées aux services de l’État par les associations sur place, dans les camps de réfugiés libanais. L’État effectue les contrôles qui s’imposent avant d’autoriser leur transfert et s’engage à examiner leur demande d’asile dans les délais inscrits au protocole.

« Ce système a l’avantage d’offrir une double sécurité : pour les gens, qui ne doivent pas voyager de façon dangereuse entre les mains de trafiquants d’êtres humains, et pour le pays qui reçoit car il sait qui vient ; il n’y a pas de surprise, tous les renseignements ont été pris », souligne Luca Negro. Le travail des Églises et de leurs œuvres sociales commence alors véritablement. Les familles bénéficiaires sont hébergées dans leurs structures le temps de se stabiliser. Cette période sera mise à profit pour les accompagner vers une insertion la plus complète possible : cours de langue, formation, conseil juridique… Dans les 15 jours qui suivent l’arrivée, un rendez-vous à la préfecture permettra de démarrer la procédure puis, dans les trois mois, la situation du demandeur d’asile devrait être régularisée avec l’obtention du statut de réfugié. Un défi bien réel, selon Jean Fontanieu, secrétaire général de la FEP : « La machine administrative française est très lente, à rebours de la dynamique d’intégration. Le risque est de désagréger ce processus social subtil. » De plus, les préfets et les maires devront s’inscrire dans cette dynamique qui, si elle existe dans un pays porteur d’une tradition d’accueil, est nouvelle et peut soulever des questions.
Source : Reforme.net

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