Ascension 2014 :“l’Église sans l’aide aux plus pauvres n’est plus vraiment l’Église”

Jeudi 29 mai, 05h15. Dur le réveil. Très dur même. Surtout pour un premier jour de pont. Et pourtant, c’est la deuxième année consécutive que je le fais, et pour cause : je pars au Mont Saint-Michel ! Chaque année, le réseau jeunesse ignatien (RJI) organise avec Chrétiens en Grandes Ecoles (CGE pour les intimes ;)) une session d’initiation à la théologie au moment du pont de l’Ascension.

Après 5h de bus où mon voisin a pu apprécier mon entrain matinal, nous (c’est-à-dire une centaine de jeunes au taquet) sommes arrivés au Bec d’Andaine, point de départ pour la traversée de la Baie, en route vers le fameux Mont. Une traversée magnifique, entre ciel et mer, avec vue imprenable et massage délicat des pieds par la vase. Un moment de repos incroyable où tout ce qui nous entoure nous revigore.

L’arrivée au Mont est encore plus belle avec la visite de l’abbaye et la procession qui précède la messe dans la basilique. Vous l’avez sans doute compris : c’était ouf ! La sortie de la messe rappelle l’endroit incroyable où nous nous trouvons, avec ce panorama impressionnant sur la mer qui a repris sa place, au crépuscule. Dieu est VRAIMENT doué niveau design ;)

Le soir même : direction Saint-Jacut-de-la-mer, qui mis à part le nom, est un charmant village où nous avons passé la suite de la session dans une abbaye. J’en profite pour glisser ici un détail de la plus haute importance : le thème de la session : « Une Église pauvre pour les pauvres ».

Nous avons donc passé là-bas deux jours pleins, où s’alternaient des temps de formation, des temps de partage et de réflexion en équipe, des temps d’ateliers, des temps de prières et des temps de détente of course. Nous avons vécu 4 jours hors du temps. C’est fou à quel point ces 4 petits jours sont une vraie coupure. J’ai été marquée par la beauté du lieu, du paysage qui nous entourait et par l’ambiance sympathique du groupe. Cela m’avait aussi frappé lors de ma première session : les personnes sont très accueillantes et bienveillantes, n’arrêtent pas de sourire et donnent sa place à chacun. Les temps d’échange n’étaient pas du tout stériles comme ils peuvent l’être certaines fois et le fait de réfléchir avec des personnes ayant des formations différentes est une réelle richesse. Et j’insiste sur le réfléchir. Cela m’avait d’autant plus apporté et marqué lors de ma première session, puisque la première année d’école dans laquelle j’étais alors, n’était pas le lieu le plus propice à une réflexion intense dirons-nous…

© Xavier Schiettecatte

Si je dois évoquer maintenant quelques idées que j’ai pu retenir de ce week-end, je dirais que c’est avant tout des rencontres. Des gens, qui m’ont tendu la main, à un moment où… non, plus sérieusement, cela m’a permis de porter un autre regard sur la pauvreté et donc aussi à mieux trouver quelle attitude avoir en face d’un pauvre (rassurez-vous, je n’y arrive toujours pas mais bon, j’essaie de m’améliorer !). En effet, étudiante à Paris, je croise de nombreux pauvres tous les jours. Je trouvais ça un peu trop facile de dire qu’un sourire suffisait et je ne savais pas vraiment quoi faire. Même si je n’ai toujours pas de mode d’emploi tout fait (ça serait franchement moche !), j’ai réalisé maintenant que ceux qui sont dans la grande pauvreté, dans la misère, souffrent avant tout d’invisibilité sociale. J’essaie maintenant de vraiment les regarder, de leur sourire, sans avoir peur de mes fragilités et de mon incapacité à trouver les mots justes.

J’ai aussi retenu un moyen tout simple dont on nous a parlé : les appeler par leur prénom. Cela peut paraître bête mais je trouve très important et très beau d’appeler quelqu’un par son prénom, c’est pour moi une manière de leur montrer mon affection et de leur montrer, à ma façon qu’ils comptent encore.

J’ai apprécié aussi le rappel tout simple qui a été fait en début de session : on ne peut pas régler le problème des pauvres sans les pauvres. Cela semble évident énoncer ainsi, mais ça l’est beaucoup moins lorsqu’il s’agit de mettre en place des actions concrètes. On peut en effet rapidement être tenté d’installer un super dispositif, bien pensé, efficace, mais en fait trop administratif, un peu en mode « t’inquiète, je m’occupe de toi parce que j’ai de la chance, je galère moins et donc je sais forcément mieux faire ». Mais aider les pauvres sans les pauvres, c’est faire comme s’ils étaient déjà morts.

J’ai aussi été rassurée en quelque sorte par le fait que seuls, nous ne pouvons pas faire grand-chose. Pour bien agir, il faut se rapprocher de structures plus importantes, qui permettent d’avoir une réelle action. Seuls, on se fait engloutir ou bien on se décourage trop vite. Cela ne veut cependant pas dire qu’il faille couper tout lien avec les plus pauvres lorsqu’on est seul. Cela renforcerait leur invisibilité sociale. Il s’agit simplement d’avoir conscience qu’agir vraiment demande de se rapprocher d’une structure adaptée.

Enfin, j’ai été interpellée par la nécessité de l’aide aux pauvres proposée par l’Église. Le service de la charité n’est pas une simple action à côté parce qu’on est catho et qu’on est censé être bien gentils. Non. Le service des pauvres est essentiel, et l’Église sans l’aide aux plus pauvres n’est plus vraiment l’Église. Notre salut passe par eux. Dieu a souci de son peuple et d’abord de ceux qui menacent de ne plus en faire partie. « Dieu s’est fait pauvre pour nous, afin de nous enrichir de sa pauvreté » (Benoît XVI). Il nous enrichit de sa seule richesse : sa confiance radicale en Dieu. Chacun, même les pauvres, est appelé à aller secourir celui qui est encore plus pauvre que lui. Il ne s’agit pas de faire un groupe de pauvres et un groupe de non-pauvres. Il s’agit simplement d’aller à la rencontre d’un plus pauvre que nous, pour lui-même, totalement gratuitement. Il s’agit en fait d’aller à la rencontre de Dieu.

Bref, j’ai passé 4 jours inoubliables au Mont St Michel et j’espère que vous en direz tout autant l’an prochain ! ;)

Marie, 20 ans, étudiante en 4e année à l’Agro.

© Thien Duc Nguyen
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