Du lien entre l’Église et l’État

Paris Notre-Dame du 19 juillet 2018

Mgr Louis Duval-Arnould est l’unique chanoine français du chapitre de la basilique St-Jean de Latran à Rome (Italie). Il a reçu le président français Emmanuel Macron à la porte de la cathédrale des papes, le 26 juin dernier. Ce prêtre du diocèse de Paris revient sur le sens de cette visite et de son ministère romain.

Mgr Louis Duval-Arnould (à g.), chanoine français de la basilique St-Jean de Latran (Rome, Italie), recevant le président Emmanuel Macron le 26 juin devant la cathédrale des papes. Prêtre du diocèse de Paris, il est protonotaire apostolique et préfet pour l’abbaye de Clairac (Lot-et-Garonne).
© M.Migliorato/CPP/Ciric

Paris Notre-Dame – Il s’agissait du troisième président français que vous receviez à la basilique St-Jean de Latran depuis votre nomination de chanoine, en 1995. Est-ce toujours la même chose ?

Mgr Louis Duval-Arnould – Oui et non. Cet événement, similaire par le cérémonial, se déroule aussi selon la personnalité du président. Je suis traditionnellement chargé de l’accueillir à l’entrée de la cathédrale des papes, à l’occasion de la prise de possession de son titre de « premier et unique chanoine d’honneur » du chapitre de la basilique du Latran. Titre qui revient de droit à chaque chef de l’État français depuis Henri IV et le don qu’il fit au chapitre des revenus de l’abbaye de Clairac (Lot-et-Garonne). Jacques Chirac était décontracté ; nous avions beaucoup discuté. Nicolas Sarkozy était très concentré. Si François Hollande a accepté le titre sans venir en prendre possession, j’ai pu le saluer comme « cher confrère » – avec un peu d’audace – lors de sa venue à St-Louis-des-Français de Rome, en mémoire du P. Jacques Hamel, en juillet 2016. Quant à Emmanuel Macron, il était à la fois détendu et grave. Il manifestait un intérêt incontestable pour ce qui se passait, désireux de concrétiser ce lien historique entre l’État français et la basilique.

P. N.-D. – Cette tradition n’est-elle pas simple « décorum », surtout pour le chef d’une république laïque ?

L. D-A. – Un peu folklorique, certes, elle n’en manifeste pas moins le lien historique de la France avec le pape et l’Église universelle qui continue d’exister malgré tout. Pour l’instant, les présidents l’ont toujours accepté – sans forcément se déplacer –, depuis que René Coty a remis au goût du jour la prise de possession du titre à Rome, en 1957. Quant à la laïcité, c’est un sujet systématique de débat en France, mais moins à l’étranger, où des traditions similaires existent : le roi d’Espagne est chanoine d’honneur de la basilique Ste-Marie Majeure de Rome, par exemple.

P. N.-D. – Ce titre change-t-il quelque chose pour un citoyen français ?

L. D-A. – Disons que par lui, tous les citoyens français ont, de facto, un lien avec l’Église universelle et le Saint-Siège. Personne n’est obligé de le reconnaître, mais il fait partie de l’histoire française, qui est chrétienne. Pour autant, nous ne devons pas faire un absolu de cette tradition : si elle vient à disparaître un jour, c’est bien l’Église de France qui reste le lien le plus vivant existant avec Rome.

P. N.-D. – Un mot sur votre mission à Rome ?

L. D-A. – Seul Français parmi les 21 chanoines du chapitre du Latran, tous prêtres du diocèse de Rome, cela m’impose particulièrement un devoir de prière pour mon pays. Au cœur de la communauté de prière que nous formons avec le chapitre pour animer la vie spirituelle de la basilique, je représente ce lien ancestral avec la France. Nous célébrons d’ailleurs une messe solennelle pour la France chaque 13 décembre, jour anniversaire du roi béarnais, en présence de l’ambassadeur de France près le Saint-Siège.

Propos recueillis par Laurence Faure

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