Enseigner à Jérusalem : quels défis ?

Paris Notre-Dame du 9 juillet 2015

Sr Hadeel Dababneh, religieuse de l’ordre des Sœurs du Rosaire
© Pauline Quillon

P. N.-D. – Sr Hadeel [1], vous êtes responsable de maternelle de l’école des Sœurs du Rosaire à Jérusalem. En fondant cet ordre à la fin du XIX e siècle, Sr Marie Alphonsine, qui vient d’être canonisée, avait un projet spécifique. Est-il toujours le même ?

Sr Hadeel – À l’époque, la société avait besoin de religieuses arabes. Il n’y en avait pas. Elle avait aussi besoin que l’on prenne soin des femmes arabes dont la condition était très dure, sous domination ottomane. Les Sœurs ont assumé la mission de former les femmes à tous les niveaux : la catéchèse, l’enseignement, l’hygiène. Elles considèrent que former une femme, c’est éduquer une famille entière. Alors elles ont créé des écoles pour les filles et soutenu l’action des prêtres dans les paroisses. L’idée était de les libérer par l’enseignement. Aujourd’hui, leur situation est plus douce, mais leurs besoins sont toujours là, ainsi que les besoins de la société d’avoir des femmes bien formées. Nous ne nous occupons pas des garçons, mais de leurs mères ! Aujourd’hui encore, nos écoles sont le plus souvent non mixtes, mais ce n’est plus toujours le cas.

P. N.-D. – Quelle est la situation particulière de votre établissement à Jérusalem ?

Sr H. – Jérusalem est une ville très instable. Cette situation n’est pas évidente pour les enfants. La précarité de la société et de leurs parents, dont beaucoup divorcent, affecte leur monde intérieur. C’est pourquoi nous avons, pour chaque niveau, un conseiller social qui s’assure que l’enfant va bien, et sert d’interface entre l’école et sa famille. Je crois d’ailleurs que cette pratique serait bénéfique dans les écoles parisiennes qui accueillent tant de cas particuliers ! Nous devons encore assurer la stabilité au cœur de l’établissement en apprenant à des enfants très différents, chrétiens et musulmans, à constituer une famille et à respecter leurs différences. Tant de problèmes découlent d’un manque de respect de la différence de l’autre ! Nous essayons de construire une culture de la paix en étant attentifs à ne pas constituer deux groupes, minoritaire et majoritaire, dans notre établissement.

P. N.-D. – Comment organisez-vous l’enseignement religieux et l’éducation spirituelle dans un culturel multi-religieux ?

Sr H. – La plupart des enseignants sont laïcs. Le catéchisme est assuré soit par les Sœurs, soit par des enseignants. Notre spiritualité est très simple, silencieuse et cachée. Elle répond à un besoin dans une époque où chacun cherche maladivement à se montrer. Nous essayons d’apprendre à travailler en silence, à supporter l’autre. Ce sont des choses simples mais difficiles à réaliser. La sainteté n’est pas loin de nous, et l’exercice de la vertu n’est pas réservé aux seuls chrétiens, elle concerne aussi les musulmans. • Propos recueillis par Pauline Quillon

[1Dans le cadre du Réseau Barnabé, coordonné par la direction diocésaine de l’Enseignement catholique de Paris, Sr Hadeel a passé quelques jours en France pour observer les méthodes d’enseignement appliquées à l’école Saint- Marcel (13e ), comme la méthode Montessori

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