Entretien de Mgr Michel Aupetit dans Famille Chrétienne

Famille Chrétienne – 3 janvier 2020

« L’Église a “pitié des foules” à l’image de son Seigneur. Le “renouveau charismatique” nous a permis de retrouver un trésor endormi, qui appartient à tout le Corps ecclésial et que chacun doit exercer selon sa grâce et selon sa mission. » Interview réalisée par Antoine Pasquier pour Famille Chrétienne.

Pourquoi l’Église catholique est-elle plus sensible aujourd’hui aux charismes et en particulier à la guérison ?

L’Église vit dans le monde et ne peut rester insensible aux besoins des hommes. L’éclatement des familles, la solitude, l’éloignement de Dieu plonge notre société dans une profonde souffrance existentielle. L’Église a « pitié des foules » à l’image de son Seigneur. Le « renouveau charismatique » nous a permis de retrouver un trésor endormi, qui appartient à tout le Corps ecclésial et que chacun doit exercer selon sa grâce et selon sa mission.

Quels sont les principes d’une pastorale catholique de la guérison ?

Il s’agit d’abord d’éveiller chez les baptisés la conscience qu’ils ont reçu l’Esprit de Force afin de pouvoir exercer une mission d’intercession, de délivrance et de guérison. Cette mission doit se vivre dans l’unité de l’Église, sous la responsabilité des pasteurs et dans la communion avec d’autres frères afin d’éviter qu’une personnalité ne tombe dans l’illusion d’un pouvoir spirituel détaché de l’esprit de service. Dieu seul guérit. Voilà pourquoi j’ai voulu mettre le Saint Sacrement au cœur de la prière de guérison et me mettre à genoux devant Lui. Je voudrais ajouter aussi que la prudence est une vertu nécessaire et qu’il ne faut en aucun cas cesser immédiatement les traitements médicaux ou un éventuel suivi psychologique suite à des prières de guérison. Toute grâce reçue doit se vérifier dans le temps.

Faut-il opposer l’audace des laïcs et des courants charismatiques à l’autorité épiscopale ? En quoi le charisme et l’institution sont-ils complémentaires ?

Je pense au geste prophétique de saint François qui dépose ses vêtements au pied de son père, dans un renoncement radical à l’esprit du monde, et que l’évêque d’Assise, Monseigneur Guido, recouvre de son manteau. Cet homme « charismatique », extraordinairement ouvert à l’influence de l’Esprit Saint, a toujours gardé conscience que sans l’amour de l’Église hiérarchique, telle que le Seigneur l’a voulue par le choix des apôtres, il n’était rien qu’une « cymbale qui retentit » comme le dit l’apôtre aux Corinthiens (I Co 13, 1). La mission entendue par François : « Rebâtis mon Église qui tombe en ruines » signifie non pas de s’en séparer, mais de la réformer d’abord par notre conversion personnelle.
L’Église est pleine de pécheurs et de pasteurs déficients, certes. Voilà pourquoi nous avons tous besoin du médecin. Elle est pourtant sainte par la Parole de Dieu qu’elle transmet et par les sacrements dont elle vit. Seuls les saints sont pleinement dignes de l’Église et ils ont toujours su garder l’unité de sa Foi et l’obéissance à ses pasteurs légitimes. L’Église nous garde de l’orgueil de prétendre agir seul. Elle nous préserve de la séduction malsaine des « gourous » isolés dans une communauté qui les vénère aujourd’hui et les rejettera demain... Nous sommes nés d’une même source baptismale, nous communions à un même Corps et nous devrons présenter nos vies devant le jugement de Dieu. « Un seul est Père » (Mt 23, 9).

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