Fin de vie : les enjeux de la loi

Paris Notre-Dame - 5 mars 2015

Paris Notre-Dame du 5 mars 2015

P. N.-D. – Concernant la fin de vie, quels principaux risques voyez-vous dans la proposition de loi Leonetti-Claeys, telle qu’elle est formulée ?

P. Brice de Malherbe, codirecteur du département Éthique et santé du Pôle recherche du Collège des Bernardins.
© Alix Bourel

P. Brice de Malherbe – La proposition de loi met en avant essentiellement deux choses : des directives anticipées, expression des souhaits concernant la médicalisation de sa fin de vie, plus contraignantes, et un droit à une sédation (mise en état d’inconscience) continue jusqu’au décès. Ces deux ouvertures peuvent se comprendre à certaines conditions. Dans la déclaration du groupe de travail de la Conférence des évêques, nous avons ainsi souligné le risque de concevoir les directives anticipées comme des formulaires d’un contrat impersonnel qui enfermerait le patient comme le médecin dans une situation aussi fictive que figée. Nous avons également pointé les risques d’une banalisation de la sédation continue jusqu’au décès, surtout lorsque le patient ne peut s’exprimer : risque de juger trop vite les derniers moments de la vie comme « inutiles » et d’entretenir le flou entre soulager la personne et abréger volontairement sa vie. Pour éviter ces risques, nous demandons que les directives anticipées puissent être rédigées dans un dialogue avec un médecin et que la bonne pratique de la sédation soit garantie par la formation des médecins et soignants et le suivi des recommandations des sociétés professionnelles compétentes. Enfin, nous avons demandé que l’alimentation et l’hydratation ne soient pas considérées d’emblée comme des moyens relevant de l’obstination déraisonnable.

P. N.-D. – Qu’est-ce qui peut se jouer lors du vote le 10 mars à l’Assemblée nationale ?

P. B. d. M. – Seraient positifs des amendements desserrant la contrainte qui pèse dans la rédaction actuelle sur la relation médecin-malade : meilleure prise en compte des situations singulières et relation moins forte entre arrêt des traitements et sédation continue. En revanche, il est très inquiétant de voir la volonté de certains de profiter du débat pour imposer l’euthanasie.

P. N.-D. – L’enjeu de la fin de vie est-il lié d’après vous à la réécriture d’une loi ?

P. B. d. M. – En fait, l’urgence d’améliorer la prise en charge de la fin de vie est ailleurs : développement des soins palliatifs accompagné d’une formation à ces soins et d’une adaptation de la tarification médicale pour prendre en compte l’importance de l’accompagnement en fin de vie. Une réflexion approfondie sur les critères de
limitation ou d’arrêt des traitements est également nécessaire.

P. N.-D. – Mgr Pierre d’Ornellas publie un livre sur la fin de vie. Quel en est l’esprit ?

P. B. d. M. – Le livre Fin de vie, un enjeu de fraternité qui sera publié ces jours-ci aux Éditions Salvator rassemble diverses contributions de médecins et philosophes sur les questions posées autour de l’accompagnement des personnes en fin de vie. Comme au moment de la révision des lois de bioéthique, l’intention est de mettre à la disposition de chacun des éléments d’information et de discernement sur les enjeux de la fin de vie. • Propos recueillis par Ariane Rollier

La fin de vie

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