Homélie de Mgr Michel Aupetit - Messes à Notre-Dame de la Salette (15e) et à Notre-Dame de Paris – Solennité de Saint Jean-Baptiste

Dimanche 24 juin 2018

 Is 49, 1-6 ; Ps 138,1-3.13-15 ; Ac 13, 22-26 ; Lc 1,57-66.80

« Comment cet enfant s’appellera-t-il » ? Cette question nous rappelle celle que nous posons aux parents le jour du baptême de leur enfant : « quel nom avez-vous choisi pour votre enfant » ? Le nom qui nous suit toute notre vie, c’est justement ce prénom qu’on nous donne le jour de notre baptême. Nous avons un patronyme, un nom de famille, qui nous inscrit dans une histoire familiale, dans un pays, dans une « tribu ». Dans la tribu Aupetit, il y en a un qui s’appelle Michel. Au sein d’une famille, notre prénom nous singularise. Il peut être le reflet de l’histoire de la famille quand on le choisit en fonction d’aïeuls très aimés. Quelquefois, il est seulement le reflet de la mode ou de la suggestion du dernier feuilleton vu à la télévision. Ce nom particulier signifie que nous sommes uniques aux yeux de Dieu qui, lorsqu’il appelle, le prononce toujours : « Abraham, Moïse, Samuel ».

Ainsi, en fut-il, de saint Jean le Baptiste. La tradition aurait voulu qu’il s’appelât comme son père. Mais Dieu en avait décidé autrement. Ses parents lui donnèrent le nom de Jean. On sait que, dans la tradition biblique, le prénom traduit aussi la vocation, l’appel, le projet de Dieu. Jean signifie « Dieu a fait grâce ».

Aujourd’hui on parle beaucoup de « projet parental ». S’il est bien normal que des parents souhaitent le meilleur pour leurs enfants, il est des projets qui enferment l’enfant et ne lui permettent pas de déployer ses talents. Comme dans la chanson de Jacques Brel : « il sera pharmacien parce que papa ne l’était pas ». Le projet parental peut être une manière de combler ses propres frustrations. Heureusement, Dieu a créé l’adolescence qui, avec ses manifestations rebelles, permettent souvent à l’enfant d’échapper aux projets trop coercitifs de ses parents. C’est le projet parental qui induit aujourd’hui dans l’esprit des personnes l’illusion d’un droit à l’enfant. Celui-ci est alors perçu comme un dû et non comme un don.

Pourtant, on le voit avec Jean-Baptiste, il existe un projet de Dieu sur chacun d’entre nous. Si la vocation, l’appel de Dieu, concerne chacun d’entre nous, il convient de la rechercher avec ardeur. Il ne s’agit pas d’un projet coercitif ou qui briderait notre liberté. Celui qui trouve sa vocation, trouve aussi sa place. Il faut pour cela la chercher et l’accueillir librement. Il est si difficile aujourd’hui de trouver sa juste place, celle qui nous correspond exactement. Nous avons alors le sentiment d’accomplir notre vie et non de la subir. Mais pour cela, il faut être dans un état d’accueil, de réceptivité de la grâce.

Jean-Baptiste aurait pu facilement se faire passer pour le Messie. Il semble bien qu’à l’époque de sa prédication, les foules le prenaient déjà pour le messie attendu. Mais il a préféré rester à sa place, celle que Dieu lui avait confiée : « Celui auquel vous pensez, ce n’est pas moi ».

Il ne s’agit donc pas pour nous de prendre la place d’un autre, ou de se forger un destin hypothétique, mais d’accomplir ce que le Seigneur nous demande personnellement. Ainsi, notre vocation sera reconnue par Dieu lui-même. Jésus ne dit-il pas de Jean le Baptiste qu’il n’en est pas de plus grand parmi les enfants des hommes.

Qui parlerait encore de lui dans le Ciel et sur la Terre s’il n’avait pas accueilli le projet de Dieu ?

Et vous ? Avez-vous vraiment demandé à Dieu quel était son projet pour vous ?

+ Michel Aupetit, archevêque de Paris.

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