Homélie de Mgr Michel Aupetit - Consécration épiscopale de Mgr Matthieu Rougé à Nanterre

Cathédrale Sainte-Geneviève-Saint-Maurice (Nanterre) – Dimanche 16 septembre 2018

 24e dimanche Ordinaire – Année B
 Is 50, 5-9a ; Ps 114 (116 A), 1-2, 3-4, 5-6, 8-9 ; Jc 2, 14-18 ; Mc 8, 27-35

Chers frères et sœurs, chers amis,
Cher Matthieu,

Ta feuille de route, cher Matthieu, est très claire. Elle t’est donnée par le Seigneur lui-même : « Prends ta croix » ! Est-ce à dire que le diocèse qui t’est confié est difficile ? Non, assurément, servir ici est une vraie joie. Mais je sais que tu aimes déjà ce peuple dont tu deviens le pasteur. Et celui qui aime saisit nécessairement qu’il accueille la croix. Une vie sans croix est une vie sans amour.

Celui qui n’aime pas n’est touché par rien. Il y a tant de gens qui, aujourd’hui, disent : « c’est ma vie, je fais ce que je veux » sans s’occuper de ceux qui les aiment et qui souffrent de leurs fantaisies égoïstes. Ces gens-là passent « entre les gouttes » comme on dit.

Chacun d’entre nous en fait l’expérience. Aimer consiste toujours à accepter la croix. Que l’on soit père, mère, époux, épouse, enfant, nous savons bien que ceux qui nous blessent le plus sont ceux que l’on aime. Que ce soit par inquiétude pour eux ou parce qu’un mot de leur part nous fait plus de mal qu’une grave insulte de quelqu’un qui nous indiffère.

Aimer c’est prendre le risque d’être blessé. Ce peuple qui t’a été confié pour que tu l’aimes te fera peut-être souffrir par l’inquiétude de son salut, par le souci de chacun, parce que tu voudras toujours faire mieux pour le servir en vérité, comme le bon pasteur souffre pour ses brebis.

Souvent à Paris, les gens me disent : « Comme votre charge doit être lourde… ». Je réponds, c’est vrai, la croix est lourde, mais j’ai de très nombreux Simon de Cyrène qui m’aident à la porter, aussi je ne sens même plus son poids. Ici, dans ce diocèse de Nanterre, tu trouveras de nombreux Simon de Cyrène, chez les prêtres, chez les diacres, les consacrés, les laïcs qui n’hésitent pas à prendre leur part de la belle mission confiée par le Christ.

Mais il y a d’autres croix. Aujourd’hui l’Église est frappée parce que le Seigneur lui demande de se convertir. Quand le péché est révélé, ce n’est pas pour humilier, c’est pour faire revenir le cœur vers Dieu comme le montre toute l’histoire de la Bible depuis l’Exode jusqu’à l’Exil à Babylone. Rendons grâce pour cette croix que le Seigneur nous inflige. Elle ne révèle le péché que pour permettre une conversion radicale. Ce qui est vrai de l’Église, est tout aussi vrai de chacun de nous. Nous sommes mis devant une alternative : « je mets devant toi la vie et la mort. Tu choisiras la vie » (Cf Dt 30, 19). L’alternative est de se convertir ou bien de consentir au péché. La conversion mène à la vie, redonne la vie.

Remettre sa vie entre les mains du Christ, c’est accomplir sa vie. Vouloir la maîtriser, c’est souvent passer à côté de cette vie car nous ne faisons que nous soumettre aux émotions, aux impulsions, aux différentes modes et contingences qui conditionnent notre quotidien. Je t’ai rencontré la première fois à Rome où tu étais séminariste. Je me rappelle avec quel dévouement tu étais venu nous chercher à une heure impossible. Je me suis dit : « Voilà un garçon donné, un vrai serviteur ». C’est avec ce même état d’esprit qu’aujourd’hui tu viens servir ici ce peuple magnifique qui attendait depuis six mois un nouvel évêque.

Tu vas recevoir la crosse du bon pasteur, l’anneau qui te fait Époux de l’Église, la mitre qui te donne l’autorité du Christ. Une autorité qui fait grandir, une autorité qui fait du bien, une autorité qui ne cherche qu’à rassembler et à unir dans la paix.

Matthieu, je me réjouis vraiment pour toi et pour ce diocèse que tu reçois aujourd’hui et qui t’accueille.

+Michel Aupetit, archevêque de Paris.

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