Homélie de Mgr Michel Aupetit - Messe de la nuit de Noël à Notre-Dame - Nativité du Seigneur

Notre-Dame de Paris - Mardi 25 décembre 2018

- Is 9, 1-5 ; Ps 95,1-3.11-13 ; Tt 2,11-14 ; Lc2,1-14

En cette belle nuit de Noël, je voudrais vous raconter une histoire. Une histoire qui m’est arrivée il y a plusieurs années, justement une nuit de Noël. J’étais appelé pour aller visiter un petit enfant malade. Il était déjà tard dans la nuit quand j’arrivai dans cet endroit qui était une cité de banlieue.

En sortant de ma voiture, je levai les yeux vers le ciel pour contempler les étoiles. Et là je vis quelque chose d’étonnant. Je crus tout d’abord à une étoile filante. Mais non, c’était le père Noël sur son traîneau. Un ange lui parlait. Il lui disait quelque chose à l’oreille et le père Noël semblait acquiescer de la tête. Je me suis frotté les yeux, pensant que j’étais l’objet d’une hallucination. Mais l’image était toujours là. Je ne comprenais pas pourquoi l’ange n’était pas à la crèche auprès de Jésus, c’est son travail, quand même ! Et puis, ce soir, on ne fête pas le père Noël, on fête l’enfant Jésus, l’enfant Dieu.

Je suis rentré dans l’immeuble et j’ai sonné chez les gens qui m’attendaient. Il était presque minuit et l’enfant, qui s’appelait Kévin et qui avait six ans, commençait à s’énerver car c’était le moment où le père Noël devait déposer des jouets dans ses souliers. Comme je restais avec ses parents, j’ai entendu un grand cri dans la pièce où étaient déposés les souliers. C’était Kévin. Dans son soulier, il n’y avait pas la petite voiture électrique qu’il avait commandée, mais une console de jeux pour un enfant de 15 ans. Ses parents ne comprenaient pas non plus.

En prêtant l’oreille, nous avons entendu d’autres cris chez les voisins. Et tout le monde est sorti, surpris, étonné, un peu fâché, car personne n’avait reçu les jouets qu’ils avaient commandés. Et tous ces gens se sont mis à se parler cette nuit-là dans cet immeuble où jamais personne ne s’adressait la parole et où les gens ne se connaissaient pas, tant l’immeuble était grand. Puis à force de discuter ils se sont mis à faire la fête ensemble et à échanger les cadeaux qui ne leur appartenaient pas. Et c’est ainsi que dans cet immeuble, le soir de Noël, il y a eu une fête formidable et depuis ce temps-là tous les gens se sont parlés et ils faisaient attention les uns aux autres. En sortant de l’immeuble, je regardais vers le ciel et je vis le père Noël en train de rire accompagné de l’ange dont le visage était illuminé d’un grand sourire.

Alors j’ai compris. L’ange était venu dire au père Noël, de la part de Dieu, de mélanger tous les jouets pour que les gens sortent de chez eux, se rencontrent et fêtent ensemble ce qui est le plus important : la naissance d’un enfant, de l’enfant-Dieu, de son Fils Jésus.

Ce soir-là, les gens de l’immeuble ont compris que le vrai cadeau, le seul cadeau, c’est celui qui est venu jusqu’à nous pour nous donner ce qu’il y a de plus précieux : son amour. Cet amour nous permet de nous regarder autrement, de changer notre regard les uns sur les autres et d’apprendre à nous aimer en partageant cet amour qui vient de lui. Le vrai cadeau, c’est Jésus, le petit enfant qui vient de naître. Vous le savez bien, un petit bébé, à sa naissance, est très fragile, et si personne ne s’occupe de lui, il va mourir. Vous vous rendez compte, Dieu s’est fait petit enfant et il s’est livré aux mains des hommes. Si personne ne l’avait reçu avec amour, il serait mort à sa naissance. Heureusement, il y avait les bras de Marie et l’amour de Joseph. C’est aussi comme cela que Jésus vient à chaque messe. Il est là, présent dans cette hostie, cette hostie si fragile et que nous pourrions écraser dans nos mains. Mais Dieu nous fait confiance, il se livre dans nos mains pour que nous le recevions et pour que nous l’aimions. Voilà le grand mystère de Noël, voilà ce qui fait notre grande joie ce soir. Puissent nos cœurs devenir l’écrin de sa Présence.

+Michel Aupetit, archevêque de Paris.

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