Homélie de Mgr Michel Aupetit - Confirmation des adultes lors de la Vigile de Pentecôte

Saint-Sulpice (6e) - Samedi 8 juin 2019

 Voir le compte-rendu.

- Ac 2, 1-11 ; Ps 103 ; Rm 8, 8-17 ; Jn 14, 15-16.23b-26

« Si vous m’aimez, vous garderez mes commandement ». Voilà qui est surprenant ! Jésus associe deux choses qui me paraissent antinomiques : le commandement et l’amour. En général le commandement n’implique pas l’amour mais la soumission. Et là où il y a soumission, il n’y a pas d’amour. Si quelqu’un me collait un pistolet sur la tempe en me demandant de l’aimer, je pourrais obtempérer par peur mais sûrement pas par amour.

Le grand commandement de Jésus c’est de nous aimer les uns des autres comme il nous a aimés. Mais peut-on commander les sentiments ? Il y aurait-il une différence entre les sentiments et l’amour ?

Nous éprouvons les sentiments et les émotions sans pouvoir les contrôler. Nous ressentons de l’affection, de la tendresse, du désir. L’amour consiste à aller plus loin, car il s’agit de s’engager, d’engager sa liberté. Les sentiments ne convoquent pas nécessairement la liberté alors que l’amour l’engage toujours. Il n’y a pas besoin d’être libre pour éprouver des sentiments mais il est nécessaire d’être libre pour aimer, c’est-à-dire pour donner sa vie. C’est d’ailleurs ainsi que Jésus définit la vérité de l’amour : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 15, 13).

Il est évident que les sentiments peuvent nous ouvrir à l’amour, au don de soi. Ils sont un puissant moteur qui permet de livrer sa vie à celui qu’on aime.

Mais comment faire pour accomplir le commandement de Jésus d’aimer ses ennemis ? Là, il ne faut pas compter sur les sentiments. Les sentiments que nous inspirent ceux qui nous détestent sont la méfiance, le rejet, parfois même la haine. Alors ?... Il faut dépasser les sentiments, s’engager dans le but et la volonté de faire d’un ennemi un ami. Il s’agit d’apprendre comme le Christ à répondre à la violence par la douceur, à la malédiction par la bénédiction comme il nous enjoint de le faire : « Bénissez ceux qui vous maudissent » (Lc 6, 28). C’est impossible me direz-vous… C’est vrai, ce n’est pas naturel ni spontané.

Je crois profondément que pour passer des sentiments à l’amour comme Jésus, il faut recevoir l’Esprit Saint. C’est pour cela que Jésus a promis le don de Dieu qu’est le Saint Esprit. Le Saint Esprit est l’amour même de Dieu, l’intelligibilité du Mystère de Dieu qu’Il nous donne à connaître.

En ce jour de votre Confirmation, vous posez cet acte libre de recevoir l’Esprit Saint en plénitude. Vous vous engagez à suivre le Christ librement et à vivre de sa vie. L’Esprit Saint vous est donné pour entrer dans l’amour qui habite le Cœur de Jésus. C’est ainsi que Jésus et son Père viennent demeurer en nous : « Si quelqu’un m’aime mon Père et moi nous viendrons chez lui et chez lui nous ferons notre demeure » (Jn 14,23). Que se passe-t-il alors ? Vous porterez du fruit. Les fruits de l’Esprit Saint sont au nombre de neuf : « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi » (Ga 5, 22-23). Saint Paul ne parle pas des fruits de l’Esprit mais du fruit de l’Esprit. Car l’unique Esprit qui produit tous ces fruits réalise l’unité totale de la personne. C’est pourquoi amour, joie, paix et patience sont une seule et même réalité. C’est par ce fruit que vous allez témoigner au monde l’amour de Dieu et ce qu’il réalise dans vos vies. La joie qui vient de Dieu est contagieuse et fait de vous des témoins. Merci d’être ces missionnaires dont l’Église a tant besoin.

+Michel Aupetit, archevêque de Paris.

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