Homélie de Mgr Michel Aupetit – Messe chrismale 2020

Saint-Germain l’Auxerrois (1er) - Mercredi 8 avril 2020

Le mercredi saint 8 avril 2020, Mgr Michel Aupetit, archevêque de Paris, a présidée la messe chrismale en l’absence des fidèles mais en présence d’une vingtaine de personnes représentant les divers états de vie dans le diocèse.

 Is 50, 4-9a ; Ps 68 (69), 8-10, 21-22, 31.33-34 ; Mt 26, 14-25

La messe chrismale traditionnellement se passe avec un grand renfort de peuple, autour de leurs prêtres, de leurs diacres, de leurs religieux et consacrés pour ce moment exceptionnel où l’évêque va consacrer ces huiles saintes par lesquelles Dieu va faire pénétrer sa grâce. Cette année le peuple est absent mais il est représenté et présent de cœur.

Pour les hébreux, l’huile pénètre au plus profond de l’être. Le psaume 109 dit même : « Jusque dans ses os ». Traditionnellement l’huile donne la force, la santé, la considération, la joie et la beauté. C’est donc un bonheur pour moi de bénir ce qui va vous rendre forts et honorables, vous rendre la santé, vous rendre joyeux et beaux, particulièrement en ces temps si douloureux et pénibles que nous vivons.

Joie : dans la Bible, l’huile parfumée est un symbole de joie : « Huiles et parfums mettent le cœur en joie » dit-elle. Et l’Ecclésiaste affirme : « Porte des habits de fête en tout temps, n’oublie pas de te parfumer la tête » (Ec 9,8). La privation de cette huile parfumée est toujours un signe de deuil en particulier quand elle est associée au jeûne. Voilà pourquoi Jésus demande : « Pour toi quand tu jeûnes parfume-toi la tête » (Mt 6,17) car jeûner pour Dieu met le cœur en joie. D’après le prophète Isaïe, le festin du Royaume où nous dévorerons des viandes grasses et boirons du vin capiteux s’accompagneront aussi de cette onction d’huile parfumée, signe de la joie messianique. C’est l’huile d’allégresse.

Honneur : Répandre de l’huile sur la tête de son hôte était une marque d’honneur. Dans le célèbre psaume 22 (23), le Seigneur est mon berger, le psalmiste se réjouit en disant : « Tu répands le parfum sur ma tête, ma coupe est débordante ». Dans les évangiles, Jésus reçoit par deux fois cette marque d’honneur d’une femme. Tout d’abord chez le pharisien Simon le lépreux. Celui-ci le reçoit mais ne verse pas de parfum sur sa tête. La pécheresse, elle, verse de l’huile parfumée sur ses pieds. Plus tard, à Béthanie, après la résurrection de son frère Lazare, c’est Marie, sa sœur, qui répand sur les pieds de Jésus un parfum de grand prix. Verser sur des pieds de Jésus signifie alors que le plus grand devient le serviteur. Cette huile sera le signe de notre incroyable dignité de fils de Dieu au baptême.

Malades : l’huile a la réputation de guérir les plaies comme on le voit avec le bon Samaritain. Mais il est aussi un rite de purification comme on le demandait aux lépreux après leur guérison. Dans l’évangile de saint Marc (6, 13), Jésus lui-même envoie ses disciples. Ces derniers font des onctions d’huile à de nombreux malades qui s’en trouvent guéris.

Catéchumènes : l’huile des catéchumènes, me direz-vous, que signifie-t-elle ? Eh bien, c’est le signe de la force qui est donnée à ceux qui doivent encore se convertir pour se préparer à devenir enfants de Dieu. Changer de vie est difficile et nécessite la force que donne le Seigneur.

La consécration : j’ai eu plusieurs fois l’occasion d’oindre de nouveaux autels avec le saint chrême. Cette consécration reprend le geste que Jacob fit quand il dressa un autel et versa de l’huile sur son sommet pour marquer la présence divine, d’où le nom qu’il donna à ce lieu Béthel : « Maison de Dieu ». Mais ce sont surtout les personnes qui sont consacrés. Avec l’onction, c’est Dieu qui les rejoint et vient habiter en eux les marquer de sa présence. Jésus ne sera pas oint avec de l’huile puisqu’il est Dieu. Mais il est oint de l’Esprit-Saint (Ac 10, 18). Il est lui-même la présence de Dieu, il est l’Emmanuel.

Le chrétien, lui, est oint, consacré. Au baptême, après avoir été plongé dans la mort avec le Christ pour ressusciter avec lui, il reçoit l’onction qui le configure au Christ prêtre, prophète et roi. A la confirmation, il est oint, marqué de l’huile sainte pour recevoir le don de Dieu promis par Jésus. Après l’imposition des mains qui confère l’ordination, le prêtre est marqué d’une onction sur les mains. Ces mains qui vont toucher le corps et le sang du Seigneur. Ces mains qui deviennent les mains de Jésus. L’évêque lui reçoit l’onction sur la tête pour signifier qu’il est configuré au Christ tête. A travers l’évêque, c’est bien le Christ et qui dirige son Église. Cette Église qui est par lui sacrement du salut.

Mgr Michel Aupetit,
archevêque de Paris

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