Homélie de Mgr Michel Aupetit - Messe à Saint-Germain l’Auxerrois (à huis-clos)

Saint-Germain l’Auxerrois (1er) - Dimanche 26 avril 2020

– 3e dimanche de Pâques – Année A
Diffusée sur KTO.
- Ac 2, 14.22b-33 ; Ps 15 (16), 1-2a.5, 7-8, 9-10, 11 ; 1 P 1, 17-21 ; Lc 24, 13-35

Depuis un mois et demi nous sommes privés de la messe. C’est le moment de réfléchir à ce qu’elle est. Avez-vous vu comment est construite la messe ? Ordinairement, on dit qu’elle est construite sur deux tables : la table de la parole et la table eucharistique.

La table de la Parole s’articule autour de ces lectures que nous venons de lire. Mais cette parole, ce ne sont pas d’abord des mots humains, prononcés ou écrits. Cette parole, c’est quelqu’un, c’est Jésus. Il est le Verbe de Dieu, la Parole de Dieu. Si nous lisons des mots, nous allons nous endormir (cela arrive souvent, avouons-le !) Si cette parole de Dieu n’est pas habitée par Jésus, si elle ne nous parle pas de Jésus, elle ne nous parle pas non plus, elle ne sert à rien.

Sur le chemin d’Emmaüs, Jésus explique cette Parole, cette Écriture Sainte ne parle que de lui. Et lorsqu’on découvre Jésus dans la Bible, notre cœur est « tout brûlant ». Ces deux hommes qui marchaient ensemble étaient désespérés. Ils avaient cru en Jésus, étaient émerveillés, pensaient qu’il allait les libérer des Romains et établir un âge d’or sous le regard de Dieu. L’alliance enfin réalisée de ce peuple d’Israël avec son Dieu. Et voilà que Jésus a fini lamentablement comme un esclave sur une croix. Or, Jésus révèle lui-même le sens de l’Écriture : l’Écriture ne parle que de lui. L’Écriture, c’est lui. Quelle découverte pour ces hommes ! Ils étaient perdus et voilà que leur cœur à nouveau se dilate pour l’amour de ce Jésus qu’ils ne reconnaissent pas encore.

Nous aussi, quand nous sommes perdus et que nous avons l’impression que Dieu nous a abandonnés, plongeons nous dans l’Écriture, relisons l’évangile. Si Jésus n’est plus physiquement auprès de nous, c’est pour nous envoyer l’Esprit-Saint qui nous fera comprendre tout ce qu’il a dit : « Le Saint Esprit que le Père enverra en mon nom, lui vous enseignera tout, il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit » (Jn 14,26). Car si l’Écriture est écrite par des hommes et emploie des mots d’hommes, c’est bien l’Esprit de Dieu qui les a inspirés. C’est ce même Esprit Saint qui nous les fait comprendre.

Mais à la messe il y a la deuxième table : la table eucharistique.

Nous sommes heureux que l’Écriture nourrisse notre esprit. Mais qui va nourrir notre corps ?

A l’autel nous présenterons à Dieu de simples offrandes : du pain et du vin.

Dans l’évangile que nous venons de lire Jésus se révèle, se fait reconnaître à la fraction du pain. Pour les premiers chrétiens, la fraction du pain désigne la messe. Et c’est là que Jésus se fait reconnaître. C’est là que son Corps est vraiment présent. Nous croyons que c’est lui-même qui s’empare de la bouche du prêtre pour que le pain devienne son corps. Nous croyons que c’est Jésus qui s’empare de la voix du prêtre pour dire : « Ceci est mon corps ».

Vous avez peut-être remarqué que juste avant de prononcer ces paroles de Jésus : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang », le prêtre étend les mains sur le pain et le vin. Avez-vous écouté ce qu’il dit ? Il demande à l’Esprit Saint de descendre sur ces offrandes pour qu’elles deviennent le corps et le sang de notre Seigneur. Et c’est là que nous le rencontrons charnellement.

Nous sommes comme les premiers disciples après la résurrection de Jésus, nous attendons ce qu’il avait promis : l’Esprit Saint.

Pensez-vous qu’il soit possible de saisir la présence de Jésus dans les Écritures sans l’Esprit Saint ? Pensez-vous qu’il soit possible de transformer le pain et le vin sans l’Esprit Saint ? Pensez-vous qu’il soit possible d’aimer ses ennemis sans l’Esprit-Saint ? Pensez-vous qu’il soit possible de bénir ceux qui nous maudissent sans l’Esprit-Saint ? Pensez-vous qu’il soit possible d’aimer comme Jésus sans l’Esprit-Saint ? Jésus nous donne son Esprit pour aimer davantage. Qu’il vienne brûler notre cœur !

+Michel Aupetit, archevêque de Paris.

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