Homélie de Mgr Michel Aupetit - Messe à Saint-Germain l’Auxerrois

Saint-Germain l’Auxerrois (1er) - Dimanche 15 novembre 2020

 33e dimanche Temps ordinaire - Année A
sans présence de fidèles, retransmise sur KTO et RND.
- Pr 31,10-13.19-20.30-31 ; Ps 127, 1-6 ; 1 Th 5,1-6 ; Mt 25,14-30

C’est extraordinaire ! Les serviteurs reçoivent des talents. Ce que leur donne le maître montre qu’il leur fait une confiance incroyable. Un talent vaut 30 kilos d’or et correspond à 15 ans de salaire d’un ouvrier de l’époque. Vous en connaissez beaucoup, vous, des patrons qui confieraient une telle somme à leurs employés ?

Bien sûr, notre esprit français va peut-être râler au nom de l’égalitarisme qu’on confond avec l’égalité. Pourquoi certains reçoivent plus que d’autres ? Nous avons l’habitude chez nous. C’est au nom de l’égalitarisme qu’on avance sur la PMA pour toutes, alors que le Conseil d’État lui-même a précisé que la situation d’une femme seule ou de deux femmes ensemble n’est pas identique dans l’engendrement à celle d’un homme et d’une femme. Étonnant qu’il faille une décision juridique pour découvrir cette évidence...

Alors ? Il est dit dans l’évangile que chacun reçoit selon ses capacités. Le maître connaît bien ses serviteurs et ne leur fait pas porter une responsabilité trop lourde. Juste ce qu’il faut à chacun.

Les deux premiers se mettent au diapason de la confiance de leur maître. Ils ont hâte de faire fructifier le trésor qui leur est confié. Le texte dit « aussitôt ».

Le troisième enterre son talent. Cela peut nous paraître bizarre mais dans le droit rabbinique enterrer un dépôt était la meilleure manière de défendre son bien contre les voleurs. Il faut dire aussi que cela dédouanait le dépositaire de toute responsabilité civile. Cet homme n’est pas dans l’illégalité. Alors que lui est-il reproché ? Tout simplement qu’il est un « bon à rien ». Bon à rien, c’est-à-dire qu’il ne prend aucun risque. Certes, il n’a pas fait de mal, mais il n’a rien fait ce qui est sans doute pire aux yeux du maître.

Dimanche dernier, le Seigneur nous demandait de veiller en attendant son retour. Aujourd’hui nous apprenons que veiller, ce n’est pas être passif et attendre sans rien faire son retour.

Le trésor inouï qui nous est confié à chacun, c’est la Bonne Nouvelle de l’évangile. Nous avons reçu ce trésor. Qu’en faisons-nous ? L’Esprit Saint, que nous avons reçu à notre baptême et en plénitude à la confirmation, est-il enfoui, caché au plus profond et tenu en dehors de nous ?

Aujourd’hui, sommes-nous comme ces deux premiers serviteurs prompts à annoncer l’évangile, à le diffuser partout avec un zèle à la mesure du Don de Dieu ? Sommes-nous vraiment des disciples missionnaires ou sommes-nous des chrétiens en pantoufles qui attendent que ça se passe ?

Il est vrai que pour se dédouaner le serviteur bon à rien argue qu’il se méfie de son maître. C’est ce même soupçon que le venin du serpent a distillé dans le cœur d’Adam et d’Eve et qui traverse toute notre histoire humaine.

De même que le maître de la parabole a confié toute sa fortune à ses serviteurs, Dieu, qui est amour, nous donne son propre Fils et son Saint Esprit. Dieu vous fait confiance, Dieu compte sur vous, Dieu croit en vous. La question est de savoir si vous, vous croyez en Dieu.

Quand nous disons « je crois en Dieu » nous affirmons que nous croyons au Père qui a tout créé et de qui viennent tous nos talents. Que nous croyons à son Fils Jésus Christ qui nous a montré la toute-puissance de l’amour. Que nous croyons au Saint Esprit qui est la force même de cet amour qui vient en nous comme un dépôt inestimable. Amen.

+Michel Aupetit, archevêque de Paris.

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