Homélie du cardinal André Vingt-Trois – Veillée de prière pour la vie avec les 8 évêques de la région Île-de-France

Mardi 21 mai 2013 – Notre-Dame de Paris

 Voir l’album-photos et la vidéo de la Veillée pour la vie.

Allocution du cardinal André VINGT-TROIS, au début de la Veillée de la Prière pour la Vie

Frères et sœurs, comme chaque année, avec les évêques et les vicaires généraux des diocèses d’Ile-de-France, nous vous invitons à une soirée de prière pour la vie et nous sommes heureux de vous accueillir ce soir aussi nombreux.

Évidemment nous ne pouvons pas entrer dans cette veillée de prière sans faire mémoire de l’événement qui s’est déroulé aujourd’hui même, ici dans cette cathédrale, où un homme s’est suicidé, pensant par-là, par cet acte de violence, faire progresser ses convictions et ses idées dans le monde.

Nous avons purifié la cathédrale par la célébration de l’eucharistie du Corps et du Sang du Christ. Mais plus que la cathédrale, ce sont nos cœurs qu’il faut purifier. C’est de nos cœurs qu’il faut chasser la violence. Jamais aucune violence d’aucune sorte, qu’elle soit physique ou verbale, qu’elle touche l’enfant innocent qui est appelé à naître, ou le vieillard abandonné que l’on veut faire mourir, qu’elle frappe nos adversaires, ou qu’elle nous frappe nous-mêmes, jamais aucune violence ne fait progresser l’être humain dans la connaissance de ce qui est bon et dans la volonté de le faire. Jamais aucune violence ne fait progresser l’amour. La violence ne produit que la violence et que la mort.

Puisque beaucoup de catholiques, dimanche prochain, participeront au rassemblement qui est organisé à Paris, je leur demande expressément, comme ils l’ont fait les fois précédentes, de s’abstenir de toute démarche de violence, non seulement dans les gestes mais dans les paroles. Je leur demande d’être des témoins de la paix et de la vie.

Homélie

 Jn 10, 7-11

Frères et Sœurs,

Nous ne sommes pas les adorateurs d’une divinité étrange qui s’appellerait la vie. La vie que le Christ veut nous donner en plénitude a une valeur incomparable non pas en elle-même, mais parce qu’elle est le signe et la réalité d’une relation d’amour. C’est parce que Dieu nous aime qu’il nous appelle à la vie, c’est parce que le Christ nous aime qu’il nous appelle à la plénitude de la vie et si nous voulons aimer nos frères à la manière dont le Christ nous a aimés, nous sommes appelés à notre tour à donner notre vie pour nos frères. Nous ne sommes pas des gardiens de la vie, nous sommes les serviteurs de la vie parce que nous bénéficions de l’amour de Dieu et que nous sommes appelés à aimer Dieu et à aimer nos frères en mettant notre vie à leur service. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. C’est cela la valeur incomparable de la vie, elle est le langage de l’amour de Dieu pour l’humanité, elle est le langage de l’amour d’un homme pour une femme et d’une femme pour un homme. Elle est le langage de l’amour des parents à l’égard de leurs enfants, elle est le langage de l’amour des frères à l’égard de leurs frères, elle est le seul bien que nous possédions et qui est tellement identifié à nous, que nous donner nous-mêmes par amour, c’est donner notre vie.

Ainsi, dans une société et une culture où chacun est plus inquiet ou angoissé de préserver ce qu’il a -et il l’est d’autant plus qu’il a peu de choses à préserver, quelquefois même pas le nécessaire- dans une culture fondée sur la possession des biens, dans une culture qui se construit sur la consommation de la création pour la prospérité de notre vie, nous risquons de perdre de vue le sens de la vie elle-même, qui n’est pas sa propre subsistance, qui n’est même pas sa défense comme un bien sacré, mais qui est la seule monnaie que nous puissions donner par amour, pour l’amour, et pour être aimés.

Nous sommes serviteurs de la vie, nous sommes témoins de l’évangile de la vie dans la mesure où nous acceptons de suivre le chemin du Christ Bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis. Les mauvais pasteurs, les usurpateurs, les voleurs, qui ne viennent que pour voler, égorger et détruire, ceux qui sont les agents de mort, ne peuvent pas entrer dans le chemin du Christ qui donne sa vie pour ses frères. Pour que nous ayons la vie en abondance, il a fallu que Jésus perde sa vie sur la croix. Pour que nous puissions naître à la vie d’enfants de Dieu, il a fallu que Jésus descende aux profondeurs des enfers. Pour que la puissance de Dieu accomplisse son œuvre en ressuscitant le Fils, il a fallu que Dieu lui-même s’engage pour la vie des hommes.

Il y a beaucoup de façons d’accompagner la vie, mais il n’y a qu’une façon de servir la vie : c’est d’ouvrir notre propre vie pour la vie des autres, c’est d’ouvrir notre propre cœur pour l’amour de nos frères, c’est de laisser l’amour transformer notre vie pour qu’elle devienne vraiment une source de vie pour tous.

Prions le Seigneur avec confiance, il a voulu que nous vivions, il a voulu sauver notre vie pour que nous puissions vivre de sa vie en plénitude, c’est notre espérance et c’est notre joie. Amen.

+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.

Homélies

Homélies