Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Appel décisif des catéchumènes 2014

Samedi 8 mars 2014 - Notre-Dame de Paris

Au cours de l’appel décisif, l’évêque authentifie un appel à suivre Jésus en disant à chaque catéchumène, comme cela avait été dit à Bartimée "Confiance, lève-toi, il t’appelle".

 Ep 4, 17-32 ; Ps 24, Mc 10, 46-52

Frères et Sœurs,

C’est une joie pour l’Église de vous accueillir et d’ouvrir ses portes devant vous. C’est une joie pour l’Église de voir que, si parfois il nous semble que des chrétiens laissent s’assoupir la foi dans leur vie, la puissance et la vigueur de l’Évangile continuent d’agir pour ceux dont le cœur et ouvert et qui sont prêts à accueillir la Parole de Dieu. C’est une joie pour nous de voir comment, aujourd’hui, en ce XXIe siècle, comme jadis sur la route de Jéricho à Jérusalem, Jésus continue de cheminer au milieu des hommes. Il continue d’entendre les appels que les hommes lui adressent. Chacune et chacun d’entre vous, à un moment de sa vie, ou à plusieurs reprises, a eu l’occasion, comme Bartimée, de dire : « Jésus, Fils de David, aie pitié de moi » (Mc 10, 47). Sans doute vous ne l’avez pas dit dans ces mots qui étaient particulièrement ajustés à ce Juif assis au bord du chemin, mais vous l’avez dit avec vos propres mots. À certains moments de votre existence, dans des difficultés, des épreuves, parfois des moments de désespoir, vous avez entendu, par la rumeur qui remplissait les alentours, comme Bartimée a entendu sans voir, qu’il y avait quelque part, quelqu’un qui pouvait quelque chose pour vous et vous avez dit : si c’est vrai, si tu es vraiment le Fils de Dieu, aie pitié de moi, viens à mon secours. Et de même que les gens qui entouraient Bartimée essayaient de le faire taire et voulaient l’empêcher de troubler les gens qui marchaient avec Jésus, de même vous avez pu avoir l’impression que des écrans s’installaient entre vous, votre détresse, votre prière et la personne de Jésus. Des écrans parfois bienveillants, qui voulaient vous protéger parce qu’ils pensaient que ce n’était pas une bonne solution pour vous, des écrans parfois hostiles, des écrans parfois inconscients, toutes sortes d’obstacles et de résistances qui ont pu se mettre entre vous et la personne du Christ. Comme l’aveugle Bartimée, nous n’avons pas toujours par nous-mêmes les moyens d’identifier clairement d’où vient cette résistance. D’où viennent ces difficultés ? Quel est cet écran qui se dresse devant nous ? Comme Bartimée, nous ne pouvons être rejoints par la Parole du Christ que si le Christ lui-même perce ces écrans et renverse ces résistances. « Jésus s’arrête et dit : appelez-le » (Mc 10, 49). Voilà comment, en ces quelques mots, se dessine le chemin par lequel Bartimée va trouver le salut. Voilà en ces quelques mots le chemin par lequel nous aussi nous trouvons le salut, vous aussi vous trouvez le salut, non plus simplement parce que vous avez entendu des rumeurs, non pas simplement parce que vous avez vaguement le souvenir d’avoir été au catéchisme, non pas simplement parce que vous avez quelque culture sur la personne de Jésus, mais parce que le regard de Jésus s’est posé sur vous et que sa parole vous a désignés, « Jésus s’arrête et dit : appelez-le » (Mc 10, 49).

C’est cet appel du Christ qui ouvre à nos yeux émerveillés la possibilité de ne pas rester enfermés dans nos difficultés, dans notre aveuglement ou tout simplement dans notre ignorance. C’est cette parole du Christ qui me permet de trouver un chemin pour aller vers lui. « On appelle donc l’aveugle, et on lui dit : confiance, lève-toi ; il t’appelle. » (Mc 10, 49), ce ne sont plus simplement des idées, ce ne sont plus simplement des impressions, ce ne sont plus simplement des intuitions, des pressentiments, c’est une parole qui vous est dite à vous, c’est un regard qui se porte sur vous, c’est un appel qui s’adresse à vous. Et c’est cet appel qui est constitutif de la foi. C’est parce que nous sommes appelés que les autres peuvent nous aider à cheminer, comme ils le font ici. C’est parce que nous sommes appelés que nous pouvons, à notre tour, dire au Christ : « Rabbouni, que je vois » (Mc 10, 51). Que mes yeux s’ouvrent, que mon esprit s’éclaire, que mon cœur s’éveille, que je vois la réalité de ta présence, de ton amour, de ta volonté de me guérir !

Au moment où je vous appelle, c’est aussi pour nous dans le diocèse de Paris, une année consacrée à l’appel, c’est-à-dire une année où j’ai invité tout le monde à revenir à cette rencontre unique avec la personne de Jésus, où j’ai invité tout le monde à prendre conscience que chacune et chacun d’entre nous, quel que soit son âge, quelle que soit son expérience, quelle que soit sa faiblesse, est appelé à entrer dans cette relation unique avec le Christ. Chacune et chacun d’entre nous est appelé à suivre le chemin du Christ. Car une fois guéri, « l’homme se met à voir et il suivait Jésus sur la route » (Mc 10, 52).

Le baptême que vous allez recevoir, qui va être l’illumination de la foi, c’est-à-dire la lumière de Dieu lui-même, qui vous aidera à entrer par l’intérieur dans cette réalité de la relation avec Dieu, cette lumière de la foi éclaire un chemin, le chemin à la suite du Christ. Saint Paul nous le disait dans l’épître aux Éphésiens : nous sommes invités à quitter l’homme ancien, à quitter notre ancienne manière de vivre pour naître à une vie nouvelle, à un homme nouveau dont l’existence est orientée par la présence de l’Esprit Saint que vous recevrez grâce au baptême et à la confirmation. C’est cette force de l’Esprit qui vous tiendra dans la fidélité au Christ et qui vous fera marcher à sa suite sur la route, même si nous savons que cette route conduit à Jérusalem, à l’arrestation, au procès, à l’exécution ; mais nous savons aussi que cette route conduit à la résurrection, c’est à dire à une vie transformée.

Frères et sœurs, tout au long de notre célébration je vais appeler chacune et chacun d’entre vous par son nom, je vais l’accueillir dans l’Église ; je vais remplir auprès de lui le rôle qu’ont joué les quelques personnes qui étaient autour de l’aveugle et qui ont dit : « confiance, lève-toi ; il t’appelle ». Je vais vous transmettre l’appel du Christ pour que vous preniez le chemin de la vie nouvelle.

Amen.

+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.

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