Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Messe à ND - Journée pour les vocations - 4e dimanche de Pâques - Année A

Dimanche 11 mai 2014 - Notre-Dame de Paris

Jésus est le bon pasteur qui donne sa vie pour que son peuple ait la vie en abondance. A l’exemple du Christ, le ministère pastoral des prêtres est défini par une mission : être au service des hommes, et l’offrande d’eux-mêmes à travers un certain mode de vie.

 Ac 2, 14a.36-41 ; Ps 22, 1-6 ; 1 P 2, 20b-25 ; Jn 10, 1-10

Frères et Sœurs,
Ce dimanche de la liturgie du temps pascal est habituellement intitulé le dimanche du « bon pasteur » parce que l’évangile rassemble un certain nombre de paroles du Christ pour définir et faire reconnaître sa mission pastorale. En ce dimanche du « bon pasteur » nous sommes invités à méditer et à prier pour les vocations des prêtres dans l’Église, et bien sûr cette prière est nourrie de l’image que Jésus nous donne du Bon pasteur. Je vous propose de repartir simplement de l’objectif de la mission de Jésus : « je suis venu pour que les hommes aient la vie et pour qu’ils l’aient en abondance » (Jn 10, 10). Le pasteur est au service de la vie de son peuple. C’est pour lui donner la vie, la protéger et la fortifier qu’il est envoyé et qu’il rassemble le troupeau dispersé afin de le conduire comme nous dit le psaume : « vers des prés d’herbe fraîche » (Ps 22), c’est-à-dire vers des lieux où le troupeau va pouvoir trouver le repos et la nourriture.

Cette mission au service de la vie des hommes nous aide à comprendre ce que le Christ est venu faire. Elle nous aide à comprendre surtout le chemin par lequel il accomplit sa mission. S’il est capable de donner la vie, et de donner la vie en abondance, c’est parce que lui-même accepte de donner sa vie pour les hommes. Il est venu pour que les hommes aient la vie ; mais pour que les hommes aient la vie, il doit donner sa propre vie. C’est en faisant l’offrande et le sacrifice de sa vie sur la croix qu’il permet à tous ceux qui vont croire en Lui de trouver eux-mêmes le chemin de la vie.

Ainsi, nous découvrons le lien intrinsèque qui existe entre la finalité de la mission de Jésus : donner la vie aux hommes en abondance, et le moyen par lequel il va aboutir à ce résultat : faire l’offrande de sa propre vie. C’est pourquoi le ministère pastoral dans l’Église n’est jamais seulement défini par une mission comme celle du Christ : être au service de la vie des hommes, et en particulier du peuple qui nous est confié, mais elle est définie en même temps par un moyen indissociable de cette mission : on ne peut pas être totalement au service de la vie des hommes si l’on ne fait pas l’offrande de sa propre vie. Ainsi, la tradition chrétienne inspirée par cette articulation entre la finalité de donner la vie à tous les hommes en abondance, et le moyen que Jésus assume de livrer sa propre vie, définissent que dans la tradition catholique, la mission pastorale est étroitement liée à une manière de vivre, à un mode de vie. Ce mode de vie doit exprimer de toutes sortes de façons, l’offrande que nous faisons de notre propre vie, pour que les hommes aient la vie. Cette offrande, nous en prenons l’engagement au moment de l’ordination sacerdotale et épiscopale, en nous engageant à vivre dans la pauvreté, la chasteté et l’obéissance, ou du moins, à essayer d’exprimer le don que nous faisons de notre vie en renonçant aux pouvoirs de l’argent, de la maîtrise sur les autres et du désir sexuel. Cet engagement est directement lié au but qui est la vie des hommes et la vie en abondance. Sans doute, le lien entre le but et le chemin n’est pas toujours évident, ni théoriquement, ni pratiquement, car tout en voulant assumer cette mission pastorale, certains refusent d’assumer les conditions de cette mission. Mais il n’empêche, que dans cette expression du Christ : « je suis venu pour que les hommes aient la vie et pour qu’ils l’aient en abondance », nous avons un signe qui s’exprime clairement et qui touche le cœur de l’homme. C’est ce que nous voyons dans le discours de Pierre au moment de la Pentecôte quand il rappelle aux Juifs venus en pèlerinage à Jérusalem, qu’ils ont été témoins de la mort du Christ sur la croix, et de sa résurrection, et que cette mort et cette résurrection sont l’expression même de sa mission pastorale : il est mort pour la vie du monde. Ce témoignage de Pierre touche le cœur de ceux qui l’ont entendu. Les Actes des Apôtres nous disent que « ceux qui l’entendaient furent remués jusqu’au fond d’eux-mêmes » et ils dirent à Pierre et aux autres apôtres : « Frères, que devons-nous faire ? » (Ac 2, 37) Oui, nous devons être remués jusqu’au fond de nous-même quand nous pensons à l’amour que le Christ a porté à l’humanité au point de lui donner toute sa vie. C’est une autre dimension du ministère pastoral qui n’est pas simplement de choisir les moyens du sacrifice pour le service de la vie des hommes, mais aussi d’être témoin de la puissance de Dieu qui a transformé cette offrande en résurrection.

Les prêtres dans l’Église doivent être à la fois témoins de cet évangile, Jésus est mort et ressuscité pour que les hommes aient la vie, et ce témoignage ils le rendent, non seulement par la parole, mais encore ils doivent le rendre par leur manière de vivre en offrant leur vie dans la vie du Christ.

Frères et sœurs, prions pour que ceux qui sont appelés à cette mission pastorale répondent généreusement et soient pour tous, ceux qui sont capables de rassembler le troupeau dispersé des hommes, pour le conduire vers les champs du repos et de la paix.

Amen.

+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.

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