Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Bénédiction de la Chapelle du bienheureux Frédéric Ozanam et dédicace de l’autel

Samedi 12 septembre 2015 - Maison Ozanam (15 rue René Blum 75017)

Le sacré n’est pas d’abord dans les choses ou les lieux mais dans les événements et la relation que Dieu établit avec les hommes. L’Église est un peuple saint constitué de pierres vivantes dont les bâtiments sont les signes visibles de cette présence des chrétiens au cœur du monde. La Maison Ozanam a cette mission d’être un signe visible de la présence de Dieu et des chrétiens au cœur d’un nouveau quartier de Paris.

 Ge 28, 11-18 ; Ps 83 ; 1 P 2, 4-9 ; Jn 4, 19-24

Frères et Sœurs,

Au moment où nous bénissons cette chapelle dédiée au bienheureux Frédéric Ozanam et consacrons l’autel qui est en son centre en figurant le Christ, les lectures de cette liturgie nous aident à comprendre le sens de ce que nous vivons. Dans la relation qui s’est établie entre Dieu et son peuple et qui s’est accomplie dans la vie de Jésus de Nazareth, puis par l’envoi de l’Esprit Saint, le sacré n’est plus dans les choses ni dans les lieux. On n’adore pas ici ou là parce que l’on se trouve sur un lieu sacré, on n’adore pas ici ou là parce que les murs, les chaises ou les meubles sont sacrés ! On adore ici ou là parce que les lieux ont été sanctifiés par un événement et une relation établie entre Dieu et les hommes. C’est ainsi que Jacob, après son dialogue avec Dieu, dit : « Ce lieu est redoutable ! C’est la maison de Dieu, la porte du Ciel ! » (Ge 28,17), « et moi, je ne le savais pas » (Ge 28,16). C’est ainsi que Pierre parle de l’Église, non pas d’abord comme d’un lieu ou d’un bâtiment, mais comme d’un peuple, et les membres de ce peuple constituent les pierres avec lesquelles est construit l’édifice. Nos églises, si belles qu’elles puissent être, ne sont que le signe visible, sacramentel, non pas d’un lieu sacré mais d’un événement sacré. Elles sont le signe visible du don que Jésus a fait de sa vie pour la vie de l’humanité. Elles sont le signe visible du peuple saint qui se constitue à travers les âges par l’appel qu’il adresse aux hommes, par la réponse que les hommes lui apportent, par la puissance de l’Esprit Saint qu’il répand dans nos cœurs. Si nous sommes attachés à nos lieux de prière, c’est d’abord en raison de cet événement, de cette relation particulière qui unit le Christ à l’humanité où nous essayons de trouver notre place en répondant à l’amour de Dieu. C’est pourquoi depuis des siècles, les chrétiens ont eu à cœur de faire que le lieu où ils se rassemblent soit le plus possible l’expression de la réalité de l’événement que constitue leur rassemblement. Ils ont, à travers les âges, rassemblés avec persévérance les éléments de décoration, d’esthétique, qui pouvaient exprimer leur volonté de rendre à Dieu une louange. C’est aussi pourquoi dans la ville de Paris qui a la particularité exceptionnelle d’être un espace clos où les surfaces libres sont rares, nous avons à cœur, chaque fois qu’un quartier le permet par la magie de la technologie moderne, de trouver un lieu pour rassembler les hommes. Nous avons à cœur non seulement que des chrétiens y vivent mais que la présence de ces chrétiens soit signifiée par un signe visible de leur vie et de leur réalité.

C’est ainsi que ce projet de la Maison Frédéric Ozanam a vu le jour en même temps que l’ensemble de ce quartier se constituait, et nous avons la joie aujourd’hui de manifester la présence des chrétiens dans ce quartier, leur volonté de contribuer à une vie harmonieuse et de mettre, autant qu’ils le peuvent, quelques services à la disposition de ses habitants.

C’est une joie pour moi de voir cette présence visible des chrétiens s’affermir et s’enraciner non pas simplement à travers les bâtiments, mais à travers le peuple constitué des pierres vivantes que représentent les chrétiens.

Je souhaite donc que cette chapelle accomplisse sa mission d’être un lieu visible de la présence de Dieu dans son peuple, qu’elle soit un lieu d’identification pour les chrétiens, un lieu de témoignage à travers leur action. En ce jour où nous bénissons cette chapelle, nous pouvons faire monter vers Dieu une prière particulière pour toutes celles et tous ceux qui ont contribué à l’accomplissement de ce projet, en particulier pour les donateurs des Chantiers du Cardinal, pour les Apprentis d’Auteuil et pour toutes celles et tous ceux qui sont engagés dans cet effort permanent de l’Église à trouver sa place dans la société et d’y donner les signes de sa présence.

Amen.

+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.

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