Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Messe à ND pour 60 ans ATD Quart Monde – 28e Dimanche du temps ordinaire - Année A

Dimanche 15 octobre 2017 - Notre-Dame de Paris

Le refus des invités à participer au festin des noces auquel ils ont été conviés par le Seigneur se traduit par une nouvelle espérance : le refus d’un petit nombre ouvre la porte au grand nombre pour entrer dans la joie de Dieu. Chaque chrétien bénéficie au cours de sa vie de cette invitation, car la persévérance dans le bien et la conversion constante font souvent défaut. Cette invitation est une occasion d’action de grâce.

 Is 25,6-10 ; Ps 22,1-6 ; Ph 4, 12-14.19-20 ; Mt 22, 1-14

En poursuivant la lecture de l’évangile de saint Matthieu, Jésus propose une nouvelle parabole pour annoncer ce qui se passera, ce qui se passe, ce qui doit se passer pour préparer l’avènement du Royaume. Quel dommage que tous ces gens aient refusé l’invitation ! Quel dommage que tous ces gens aient eu mieux à faire qu’à répondre à l’invitation de venir aux noces ! Quel dommage pour eux car ils se sont privés de la joie de la rencontre avec Dieu ! Quel dommage encore plus grand pour ceux qui ont tué les serviteurs ! Comme nous l’entendions dimanche dernier à travers la parabole de la vigne, nous voyons ici comment Jésus pointe du doigt le refus des scribes et des pharisiens de reconnaître qu’avec lui s’accomplit la promesse de Dieu, comment il rappelle les générations successives des prophètes qui sont venus appeler le peuple à la conversion et qui ont été peu entendus, souvent molestés, et parfois mis à mort.

Évidemment, nous pouvons comprendre que ce refus de participer au festin des noces et de répondre à l’invitation du Seigneur n’est pas simplement un drame particulier pour une catégorie de gens. C’est aussi une espérance, car ce refus va conduire le maître de la maison à envoyer ses serviteurs inviter beaucoup plus largement que prévu, et à ramasser tous ceux qu’ils peuvent trouver pour remplir la salle des noces : les mauvais comme les bons. Le refus d’un petit nombre ouvre la porte au grand nombre pour entrer dans la joie de Dieu.

C’est une occasion pour nous de comprendre que le jugement qui est en train de s’appliquer n’est pas d’abord une instance destinée à condamner et à châtier, mais un moment de vérité. Ceux-là qui ont mieux à faire que de répondre à l’appel de Dieu n’ont pas leur place au festin des noces, mais leur place ne restera pas vide : elle sera proposée à d’autres. Dans un autre passage de l’Évangile, Jésus dit à ses apôtres que là où ils ne seront pas reçus, qu’ils s’en aillent en secouant la poussière de leurs pieds pour manifester la réalité du refus qui leur a été opposé, et qu’ainsi libérés, ils puissent aller porter la bonne nouvelle à d’autres. Nous comprenons bien que cette parabole, cette mise en scène de l’invitation refusée et de l’invitation élargie n’est pas simplement une parole de circonstance adressée aux scribes et aux pharisiens pour mettre en relief le refus qu’ils opposent à la prédication de Jésus. C’est aussi une parole destinée à nous éclairer, nous, à éclairer nos cœurs, à éclairer nos libertés, à éclairer l’orientation que nous donnons à notre vie, car nous qui sommes ici, les mauvais et les bons, nous avons bénéficié de cette ouverture nouvelle par laquelle des invités imprévus sont appelés à participer au festin du Royaume.

Semaine après semaine, Dieu nous appelle à constituer l’assemblée des noces. Semaine après semaine, il nous propose de partager la fête et de recevoir les mets savoureux qu’il a préparés, comme le prophète Isaïe l’annonçait. Semaine après semaine, il nous invite largement à entrer dans la salle des noces. Ceci ne veut pas dire que ce que nous sommes, ce que nous vivons, ce que nous faisons, soit sans importance. En effet, nous voyons le Christ parcourant les invités rassemblés, et parmi eux, un n’a pas revêtu le vêtement des noces, c’est-à-dire qu’il n’est pas entré dans la voie nouvelle à laquelle il était appelé, il n’a pas exercé la conversion pour laquelle il a été choisi.

Frères et sœurs, combien de fois dans notre vie avons-nous refusé de quitter nos affaires, nos occupations, pour répondre à l’invitation du Père ? Combien de fois dans notre vie avons-nous combattu contre la parole qu’il nous adressait ? Combien de fois dans notre vie avons-nous été émerveillés que, malgré la médiocrité que nous constatons en nous, il continue de nous inviter largement, il nous appelle à participer au festin des noces ? Combien de fois dans notre vie avons-nous été heureux de pouvoir entrer dans la fête de la table eucharistique qui nous est proposée semaine après semaine ?

Ce soir, rendons grâce au Seigneur qui nous a appelés à participer au banquet des noces de l’Agneau. Rendons grâce au Seigneur qui ne s’est pas arrêté à regarder si nous étions bons ou mauvais. Rendons grâce au Seigneur qui nous a permis de changer quelque chose dans notre vie pour que, sous l’apparence de nos habits ordinaires, il puisse reconnaître le vêtement des noces. Rendons grâce au Seigneur qui veut nous rassasier des mets raffinés de sa table, qui veut nous rassasier de la parole du Christ que nous recevons, du corps ressuscité du Christ que nous partageons. Rendons grâce au Seigneur d’être invités aux noces de l’Agneau.

Amen.

+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.

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