Homélie et mot d’accueil du cardinal André Vingt-Trois - Veillée de prière à l’intention de Sophie Morinière et sa famille, des autres accidentés et des jeunes participant aux JMJ de Rio

Jeudi 18 juillet 2013 – Saint-Léon (Paris XV)

A la suite de l’accident d’autocar en Guyane du mercredi 17 juillet 2013, une veillée de prière a été organisée en l’église St Léon (Paris XV)

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Mot d’accueil du cardinal André Vingt-Trois

L’accident qui a couté la vie à Sophie et qui a blessé un certain nombre des membres du groupe est de ces événements qui fracassent non seulement les corps mais qui fracassent aussi les cœurs. C’est l’irruption de la souffrance, de façon imprévue. Nous avons besoin dans ces moments-là, comme une famille se resserre dans l’épreuve, de nous entourer les uns les autres, de nous manifester les uns aux autres et tout d’abord à sa famille évidemment et à ses amis, notre amitié, de nous soutenir pour essayer de vivre dans la foi un tel événement. Depuis que la nouvelle de cet accident est arrivée et qu’on a appris la mort de Sophie et les blessés, j’ai reçu quantité de messages de beaucoup d’évêques de France, de plusieurs personnalités, qui ont voulu manifester leur sympathie et exprimer ainsi d’une certaine façon leur présence.

Et en ce moment même, à l’église du quartier général français des Journées Mondiales de la Jeunesse, une messe est célébrée en communion avec notre veillée de prière, avec les volontaires français, des membres de la communauté française, des représentants de l’organisation des JMJ et des représentants des autorités consulaires. D’autre part, le chœur de St Christophe de Javel, qui termine une tournée, dédie le concert qu’elle donnera ce soir à St Anatoile de Salin, dans le Jura, à Sophie Morinière.

Vous le savez peut-être, Sophie avait accepté de donner chaque jour une chronique des JMJ pour les auditeurs de Radio Notre Dame, elle répondait aux questions d’Elodie Chapelle et, avant d’entrer dans la prière, nous allons entendre un bref extrait de sa chronique du 16 juillet, qui nous permettra d’entendre la voix de Sophie, l’écho de sa foi et de son attention aux autres.

Homélie

 Mt 11, 28-30

Dans notre vie chrétienne nous essayons de vivre dans la présence du Christ. Nous essayons de fixer nos yeux sur lui et de le reconnaître comme celui qui nous apporte le Salut, celui qui est doux et humble de cœur, celui qui est passé parmi les hommes en faisant le bien, celui qui est venu guérir les maladies et délivrer l’homme des esprits mauvais qui l’habitaient.

Tout cela, nous le croyons, nous en sommes convaincus et nous essayons de le vivre. Mais il est des moments de notre vie où cette certitude est soumise à l’épreuve. « Mon joug est facile, dit le Christ, et mon fardeau, léger » (Mt 11, 30), si ce n’était pas lui qui disait cela, nous ne pourrions pas le croire car nous savons que le joug qu’il a porté, c’est le bois de la croix sur son épaule et le fardeau qui l’a fait trébucher plusieurs fois n’était pas un fardeau léger.

Comment peut-il dire « mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger » ? Il ne veut pas dire certainement qu’il élimine toutes les difficultés et toutes les souffrances de notre vie. Il ne veut pas dire qu’il fait échapper ses disciples aux drames de l’existence. Et nous en sommes, aujourd’hui, les témoins.

La famille de Sophie, ses amis, tous ceux pour qui elle tenait une place si importante dans leur vie savent que le fardeau est lourd et que le joug n’est pas facile à porter. Et pourtant, nous croyons que le Christ nous dit la vérité. Comment transformer la réalité que nous vivons ? Par quelle force, par quelle énergie extraordinaire ? Comment Jésus prenant sur lui le bois de la croix et chutant sous le poids des souffrances peut-il trouver que le fardeau est léger ? Ce n’est pas parce que ce fardeau serait objectivement léger, mais parce que Jésus le porte dans l’énergie de l’amour. Et si nous avons l’espérance d’affronter les drames de l’existence humaine, non seulement les petits ennuis quotidiens, les petites anicroches qui surviennent toujours dans la vie, les maladies bénignes, mais le drame, le vrai, celui qui touche notre vie, si nous avons l’espérance de pouvoir assumer ce fardeau, c’est seulement parce que nous sommes animés par l’amour.

Il n’y a que l’amour qui peut vaincre la mort. Il n’y a que l’amour qui peut nous permettre de porter ensemble les fardeaux insupportables. Cet amour, c’est l’amour que Dieu porte à chacun d’entre nous. Et cet amour de Dieu pour chacun d’entre nous s’exprime dans l’amour que nous nous portons les uns aux autres. Et c’est pour être témoins de cet amour que nous avons voulu être avec vous ce soir, que nous avons voulu dire qu’il y a quelque chose dans cette vie qui est plus grand que la mort, c’est l’amour.

Jésus, doux et humble de cœur qui regardait la foule, qui l’entourait avec pitié, pose sur nous son regard d’amour pour nous relever et nous faire vivre. C’est dans la foi en cette présence du Christ, en cet amour de Jésus pour chacun d’entre nous, que nous croyons que Sophie est entrée dans la joie de Dieu.

C’est dans cet amour qu’elle mettait réellement en pratique dans sa vie de chaque jour que nous sommes appelés à vivre le départ qui l’a frappée.

Que le Seigneur nous donne la force de nous aimer les uns les autres pour que l’amour de Dieu soit une réalité aujourd’hui.

+ André cardinal Vingt-Trois, Archevêque de Paris.

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