« Je continuerai de prier pour l’Église qui est à Paris »

Paris Notre-Dame du 26 mai 2022

Après plus de six mois passés à Paris comme administrateur apostolique, Mgr Georges Pontier repart chez lui, en terre toulousaine. Il nous a accordé un dernier entretien avant son départ.

Mgr Georges Pontier lors de la restitution des contributions du synode, le 22 mai à St-Sulpice (6e)
© Marie-Christine Bertin / Diocèse de Paris

Paris Notre-Dame – Après six mois passés à la tête du diocèse de Paris comme administrateur apostolique, quel est votre regard sur l’Église de Paris ?

Mgr Georges Pontier – Je peux dire que je ne connais pas encore l’Église qui est à Paris. J’en ai vu quelques facettes, et plutôt les petites réalités que les grosses paroisses. Pour moi, le plus important s’est vécu autour de la célébration et du partage de notre foi, à travers des moments forts, comme la messe chrismale, les confirmations, l’appel décisif des catéchumènes… J’ai aimé percevoir la solidarité qui se vit dans beaucoup de paroisses, avec Hiver solidaire qui fait appel à tant de bénévoles, comme autant de visages de la charité dans ce diocèse. J’ai aussi pu constater combien la vie religieuse, dont la présence est si nombreuse dans ce diocèse, apporte ses richesses et ses charismes. Il y a aussi une capacité et une disponibilité en matière de formation qu’on trouve dans peu d’endroits. Il y a beaucoup de belles choses à Paris, une très belle richesse.

P. N.-D. – Vous dites parfois que la richesse n’est pas toujours un cadeau ?

G. P. – La richesse peut rendre orgueilleux, individualiste. On peut être en-dehors de la vie de beaucoup de gens. L’enjeu, dans un diocèse comme Paris, c’est de ne pas tourner que sur soi-même mais de voir la dimension diocésaine. Il est difficile, dans un diocèse aussi peuplé et aussi gros, que les choses ne tombent pas dans l’anonymat d’un côté ou dans l’individualisme de l’autre. On vit de très belles choses en paroisse, mais la conscience diocésaine est compliquée. Certaines paroisses sont tellement riches qu’elles trouvent en elles-mêmes de quoi occuper tout leur temps. Or, l’Église n’est jamais de type associatif. On ne fait pas son Église, on appartient à l’Église. Une Église nous est donnée et on est donné à l’Église. On n’est pas seulement responsable de sa paroisse, mais aussi des autres communautés. On ne fait pas une totalité à soi tout seul. On donne, on reçoit, et il y a quelque chose à réfléchir sur cet échange entres les paroisses de l’Est et de l’Ouest et sur les outils au service du lien, du partage et de la communion dans le diocèse.

P. N.-D. – Vous parlez des paroisses. Comment avez-vous trouvé le clergé parisien ?

G. P. – Nous avons organisé, très peu de temps après mon arrivée, dix rencontres afin que je puisse connaître tous les prêtres de Paris qui le souhaitaient. C’était un temps nécessaire pour qu’on prenne le temps de s’écouter, de se parler, de se remettre dans la confiance, dans le Seigneur. Tout au long de ces six mois, j’ai côtoyé ce clergé et j’y ai trouvé de très bons prêtres qui vivent bien leur ministère, qui aiment leur ministère et qui aiment les gens. Bien sûr, j’y ai aussi trouvé des fragilités, comme partout. Il y a tellement de prêtres que c’est un peu frustrant, pour eux comme pour l’archevêque, de ne pas se voir davantage. Le fait qu’ils soient nombreux peut aussi rendre difficile la mise en place de responsables laïcs ou la coresponsabilité… En ce sens, la démarche synodale tombe opportunément pour ce diocèse. J’ai d’ailleurs été très heureusement surpris que près de 700 équipes et 6 500 personnes aient participé à la phase diocésaine du synode. Cela reflète une tonalité, une soif de poursuivre une Église où tous les baptisés sont pris au sérieux, sont mis en responsabilité, et puissent vivre une fraternité ecclésiale en quelque sorte.

P. N.-D. – Comment définiriez-vous la mission de l’archevêque de Paris ?

G. P. – La fonction d’un évêque se décline selon le diocèse dont il a la charge. À Paris, nul doute que l’archevêque trouve des soutiens infiniment plus nombreux et performants qu’ailleurs, là où d’autres évêques vivent une certaine solitude dans leur diocèse. De fait, à Paris, l’évêque est rarement en première ligne, et on s’est habitué à ne pas le voir en première ligne. C’est dommage. Il doit accepter cette espèce d’ascèse qui l’empêche, souvent, d’être moins en contact avec l’ordinaire des jours, et davantage en contact avec des structures, des responsables, des conseils. Il y a aussi une grande part de relations publiques. On ne peut pas être évêque à Paris sans être en lien avec les autorités de la ville mais aussi de l’État. C’est immense, tout est multiplié. Il y a tellement de possibilités, tellement de choses à accueillir que ça peut être grisant. C’est aussi passionnant. J’aurais beaucoup reçu pendant ces quelques mois. Mon regard sur le diocèse de Paris est renforcé en positif. Je priais déjà depuis des années pour ce diocèse. Comme beaucoup de Français passent une tranche de leur vie en Île-de-France, pour leurs études ou leur travail, ces diocèses franciliens rendent un service éminent à toutes les Églises françaises, qui récoltent ensuite les personnes formées à Paris. Je continuerai de prier pour l’Église qui est à Paris, que j’ai appris à aimer, et je souhaite bonne route à ce diocèse sous la conduite de son nouvel archevêque, Mgr Laurent Ulrich.

Propos recueillis par Charlotte Reynaud

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