La PMA en débat

Paris Notre-Dame du 13 juillet 2017

Le P. Laurent Stalla-Bourdillon livre ses réflexions à propos de l’avis sur l’assistance médicale à la procréation (AMP), rendu public le 27 juin par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE).

P. Laurent Stalla-Bourdillon, curé-recteur de la basilique Ste-Clotilde (7e) et directeur du Service pastoral d’études politiques.
© D. R.

Paris Notre-Dame – Que pensez-vous des recommandations du CCNE ?

P. Laurent Stalla-Bourdillon – L’avis défavorable du CCNE sur la GPA (gestation pour autrui) et la conservation des ovocytes ne crédibilise en rien l’avis favorable sur la PMA (procréation médicalement assistée) pour des femmes célibataires ou en couple (qui implique le recours à la technique de l’insémination artificielle avec donneur). L’absence de consensus au sein du CCNE atteste de contradictions et prouve que ces questions sont d’une redoutable gravité. L’entrée dans l’ère de la biologie reproductive ne s’est pas accompagnée d’un effort de réflexion éthique permettant de renoncer à son pouvoir. Nous réinventons une éthique lorsque nous décrétons « éthique » ce qui finit par ne dépendre que de nous, seuls. Va-t-on vers l’organisation d’une filiation sans père ? La médecine changera-t-elle de rôle en répondant à des questions sociétales ? Devant la montée irrépressible du pouvoir que prennent les biotechnologies sur les instances politiques, auxquelles rien ne semble pouvoir résister, un nouvel effort de réflexion sur l’humain est nécessaire. La conquête du mystère de la vie ne se trouve pas dans les manipulations du vivant, mais dans l’intelligence que nous avons de ce qui est d’abord et invariablement un don !

P. N.-D. – Comment l’Église peut-elle accompagner les personnes qui souffrent de l’impossibilité de concevoir un enfant ?

L. S.-B. – De quelle impossibilité parlons-nous ? La requalification d’une incapacité à concevoir, en préjudice causant une souffrance exigeant réparation, accélère la fragilisation de la société. L’instrumentalisation de l’enfant devant la souffrance du manque des adultes va-t-elle conduire à un droit à l’enfant ? L’ouverture d’un marché de la santé reproductive donne l’illusion de pouvoir faire des enfants à la demande. Or, tout enfant devra accéder à sa conscience de personne libre et aimée et appelée à aimer. Cela advient lorsqu’il découvre sa véritable origine dans la gratuité du don qui lui a été fait. À cette condition, l’enfant échappe au statut de « produit » issu de la seule volonté humaine. Il peut alors donner sens à sa vie en ce monde, tout en assumant sa vulnérabilité et sa mortalité. « Avoir des enfants » semble s’imposer comme un nouveau droit pour réussir sa vie. Mais être parent consiste à entrer soi-même dans une généalogie. Pour les parents chrétiens, elle est divine et suppose la confiance en Dieu, suprême protéine du bonheur pour le cœur de leur enfant. Jamais un enfant ne doit penser qu’il est le « produit » d’un autre homme qui aurait tout pouvoir sur lui. Il sera toujours infiniment plus que ce que ses parents ont compris de lui : pour les chrétiens, il est d’abord et toujours une œuvre de Dieu et une parole de Dieu. Notre société ignore ou refuse cette possibilité. L’Église peut aider à regarder la vie, non à partir des techniques de procréation mais à partir de la relation fondamentale à Dieu, à l’amour qui seul éternise nos vies. Sans cela, les techniques de procréation les plus abouties ne feront qu’accroître l’angoisse de ne pouvoir maîtriser totalement la vie et la mort. La révision des lois de bioéthique prévue en 2018 sera l’occasion d’un éclairage pastoral pour préciser en quoi ce n’est pas « d’avoir un enfant » qui apaise une souffrance, mais c’est toujours un surcroît d’amour qui nous en libère.

Propos recueillis par Céline Marcon

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