Oser la confiance, oser la parole

Paris Notre-Dame du 18 février 2016

P. N.-D. – La jeunesse est éprouvée par les difficultés et la violence dans notre société. Comment faire face et avancer ?

P. Nicolas Delafon, délégué diocésain pour les vocations religieuses et sacerdotales.
© Geneviève de Saint-Pern

P. Nicolas Delafon – En ce moment, nous avons l’impression que la barque prend l’eau : dans les familles, dans l’Église, dans la société, etc. L’insécurité ambiante n’est pas seulement sociale. Elle est présente dans les Évangiles. Dans celui de saint Matthieu, l’agitation est telle, dans la mer, que la barque est couverte par les vagues. On a l’impression de ne plus voir la barque mais seulement les vagues (cf. Mt 8, 24). Et Jésus dort. Pour tous, la tentation est de vouloir combler par soi-même les fissures apparentes ou de transformer la simple barque en paquebot insubmersible. En réalité, c’est un appel à prendre soin de la jeunesse. On ne peut reprocher aux plus jeunes d’être sans expérience de la vie et de se sentir éprouvés. La question est celle de la présence d’adultes capables de les aider. Or, les adultes sont eux-mêmes éprouvés et les fissures sont aussi présentes dans notre cœur d’adulte. C’est donc un appel pour tous à revenir aux fondamentaux de la foi chrétienne : l’espérance, la condition filiale, l’union au Christ pauvre et éprouvé dont le regard est tourné vers le Père…

P. N.-D. – Comment être sûr de faire le bon choix pour réussir sa vie ?

P. N. D. – Le désir de certitude n’est pas illégitime. Nous n’avançons pas sans appuis. Chaque matin, nous sommes sûrs que le soleil se lève. Combien de temps dureront ces certitudes écologiques ? Devant un choix, la question est de savoir où chacun recherche la certitude qu’il espère. Dans les psaumes, Dieu est le Rocher (cf. Ps 18, 3). Il est un appui sûr, car tout juif, comme Abraham, a conscience de marcher avec Dieu. Vivre, c’est aller dans la foi de Dieu, à Dieu, avec Dieu. Nul ne peut s’engager sur ce chemin de foi sans une certaine sécurité intérieure. Pour un lycéen ou un étudiant, les engagements et l’exercice de la mémoire augmentent la confiance en soi. Cette solidité passe aussi par une clarification des questions. Tous les dialogues philosophiques de Platon explicitent le passage de l’opinion à la vérité. Comment réussir sa vie ? Posée ainsi, cette question est extérieure à la foi chrétienne. Elle doit être reformulée : « comment opérer un choix pour rendre témoignage à l’Amour jusqu’à la Croix en étant sûr, dans la foi, d’aller vers la Vie ? » Sans doute, en exerçant sa capacité de choix au risque de se tromper.

P. N.-D. – Les jeunes peuvent-il être témoins de leur foi même s’ils sont en recherche ?

P. N. D. – Des paroles du père Henri de Lubac m’ont personnellement aidé : « Pensez, vivez et soyez : puis, tâchez d’exprimer scrupuleusement ce que vous pensez, ce que vous vivez, ce que vous êtes. » Donc, ne pas attendre d’être parfaitement formé pour être témoin, car la foi est fondamentalement une recherche. La force paradoxale du croyant est d’être un chercheur : chercheur de Dieu et de l’homme, ensemble. Depuis des années, dans le cadre du parcours Even, à plusieurs, nous essayons de susciter chez les plus jeunes une parole à travers l’étude de la Parole de Dieu. Nous tâtonnons, et les étudiants cherchent avec nous ; le chrétien ne doit pas craindre ce tâtonnement, car c’est sa force, le signe de la souplesse de l’Esprit qui essaye de s’adapter aux situations changeantes et d’offrir au monde une parole reçue de l’Esprit. • Propos recueillis par la Rédaction

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