Oser la rencontre grâce à Emouna : l’amphi des religions

Paris Notre-Dame du 12 mai 2022

Emouna : l’amphi des religions, soutenu entre autres par la Fondation Notre Dame, fête ses 5 ans d’existence. L’occasion de revenir sur la genèse et les spécificités de cette formation destinée en priorité aux ministres du culte, avec le P. Thierry Vernet, membre du collège des fondateurs d’Emouna et délégué diocésain pour le judaïsme.

Propos recueillis par Charlotte Reynaud

Le P. Thierry Vernet est membre du collège des fondateurs d’Emouna et délégué diocésain pour le judaïsme.
© Isabelle Demangeat

Paris Notre-Dame – Comment est née la formation Emouna ?

P. Thierry Vernet – Emouna est née, en partie, à la suite des attentats de 2015. Ce qui était auparavant une intuition et un projet porté, entre autres, par le rabbin Pauline Bebe et moi-même, alors que j’étais vicaire à St-Paul-St-Louis (4e), s’est imposé comme une nécessité : celle d’améliorer les liens entre les différentes religions et l’institution mais aussi de favoriser la connaissance mutuelle entre chaque culte. Pour beaucoup, la religion devenait un problème, une source de violence. Or, nous croyons fermement qu’elle peut être une ressource pour la société et un vecteur de solutions à apporter. Un noyau s’est constitué, appelé aujourd’hui « collège des fondateurs », pour réunir des représentants des cultes en France, qui soient crédibles dans leur communauté. Des représentants de l’islam, de l’Église catholique, protestante et orthodoxe, de la communauté juive et de l’Union bouddhiste de France se sont ainsi unis pour proposer cette formation, à destination des ministres du culte essentiellement, baptisée Emouna : l’amphi des religions, accueillie par Sciences Po Paris qui a mobilisé ses ressources pour en faire une certification diplômante.

P. N.-D. – Pourquoi ce nom Emouna ?

T. V. – Il a été choisi parce qu’il a des résonnances dans les trois monothéismes. En hébreu, « emouna » signifie la foi, la confiance. Dans le christianisme, c’est la racine du mot « amen » – qui est d’ailleurs un acte de foi – et en arabe, il donne « amana », qui signifie confiance.

P. N.-D. – Comment se déroule cette formation ?

T. V. – Notre formation – qui se déploie sur dix-huit jours répartis sur un an – veut à la fois dispenser un contenu académique, s’appuyer sur des exercices pratiques et mettre en valeur le dialogue et la rencontre. Chaque promotion compte trente-six étudiants, et nous veillons à ce qu’il y ait un équilibre entre les différentes religions. Il y a quatre modules dans l’année : « religions et institutions » – pour approfondir les liens entre les religions et les institutions, mieux appréhender la question de la laïcité –, « religions et cultures » – qui permet d’améliorer la connaissance mutuelle de chaque culte –, « religions et leadership » – pour développer les compétences nécessaires à l’exercice de responsabilités dans une communauté religieuse – et un dernier module, plus personnel, « produire et rencontrer ». Pour ce dernier volet, on demande à chaque étudiant de rédiger une note personnelle sur la manière dont il a vécu cette formation, d’une dizaine de pages minimum. Pour les fondateurs, c’est toujours un moment de satisfaction car on découvre qu’il se passe quelque chose de très fort durant cette année, de l’ordre de la conversion à l’autre. À ces différents modules s’ajoute un projet collectif qui doit réunir les représentants d’au moins quatre religions. Cela peut être la rédaction d’un livre, l’organisation d’une soirée ou un travail auprès des écoles.

P. N.-D. – Après cinq ans, quel est le bilan de cette formation ?

T. V. – Le bilan est positif, à bien des égards. Emouna s’exporte à l’étranger, au Pays-Bas et en Belgique. D’autres destinations sont en projet. Mais le plus beau, ce sont les réseaux d’amitié – presque improbables – qui se sont créés. Par la connaissance de l’autre, on fait tomber les préjugés et la peur, et on peut devenir partenaires. Il ne s’agit pas de promouvoir le syncrétisme ni des idées simplistes sur la religion, mais de pouvoir faire des rencontres très profondes et ainsi œuvrer à la paix.

23 mai

Emouna fête ses cinq ans. Vivez l’expérience Emouna : l’amphi des religions le temps d’une soirée, avec exposition, table ronde et performances artistiques. Informations et inscription sur sciencespo.fr/evenements ; 27, rue St-Guillaume (7e) ; 18h30 à 21h.

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