Pèlerinage en Terre Sainte 2007

Du 12 au 15 février 2007, un pèlerinage-découverte a eu lieu sous la présidence de Mgr André Vingt-Trois. 588 personnes y ont pris part dont une soixantaine de prêtres et une trentaine de journalistes.

Compte-rendu du pèlerinage-découverte en Terre-Sainte

L’objet premier de ce pèlerinage était l’invitation de l’Université de Tel-Aviv à donner une conférence avec le Grand Rabbin d’Israël Mosche Amar sur le thème “Sécurité et éthique au XXIe siècle”. Dès les premiers contacts, Mgr Vingt-Trois a subordonné son acceptation à l’exigence de pouvoir se rendre à Jérusalem, Nazareth et Bethléem et de pouvoir rencontrer qui il voulait, en particulier le Patriarche latin, Sa Béatitude Michel Sabbah. Le représentant à Paris du Ministère du Tourisme israélien a alors émis la proposition qu’un groupe important venu de France accompagne l’Archevêque. Le programme a été arrêté en fonction de nos exigences. Nos relations avec le Patriarche latin et les communautés de Nazareth et de Bethléem n’ont donc pas été improvisées sous la pression.

Ce voyage a eu lieu du lundi 12 au jeudi 15 février 2007. 588 personnes y ont pris part dont une soixantaine de prêtres et une trentaine de journalistes. Les pèlerins étaient répartis en 13 cars, accompagnés chacun par un guide israélien et par un prêtre ou un laïc, compétent pour assurer les compléments nécessaires et l’animation spirituelle.

Le lundi 12 février, les pèlerins ont célébré la Messe en l’église Saint-Antoine à Jaffa. Lire l’homélie de Mgr Vingt-Trois.
Ils ont ensuite gagné l’université de Tel-Aviv. Mgr Vingt-Trois a participé à une conférence de presse avec le Ministre du Tourisme, M. Herzog, le Grand Rabbin Amar et le Président de l’Université, le Professeur Rabinovitch. Dans l’amphithéâtre, après un mot d’accueil du Ministre du Tourisme et du Président de l’Université, les deux conférenciers ont exposé leur réflexion ; ils ont ensuite répondu aux réactions exprimés par différentes personnes : Mme Voisin, M. Levaï, le Rabbin Israël Singer, du Congrès Juif Mondial, le Professeur Fischer, etc. Lire la conférence de Mgr André Vingt-Trois.
L’Ambassadeur de France en Israël assistait à la conférence et a donné ensuite une réception dans sa résidence pour Mgr Vingt-Trois et une partie du groupe.

Le mardi 13 février a permis de visiter la Galilée.
A l’invitation du KKL, fonds pour la sauvegarde de la terre d’Israël, ils ont planté des arbres dans un site proche du lac de Tibériade. L’après-midi a été consacré à la méditation devant le lac et à la visite de quelques sites avant d’arriver à Nazareth.
Le groupe a été accueilli devant la fontaine de la Vierge par Mgr Marcuzzo, vicaire patriarcal et évêque auxiliaire du Patriarche latin, entouré de quelques fidèles de Nazareth et de plusieurs des religieux ou religieuses qui y vivent. Après avoir salué les Grecs orthodoxes dans l’église de la fontaine, Mgr Vingt-Trois et Mgr Marcuzzo ont conduit une procession dans les rues de la ville, jusqu’à la basilique. A l’entrée de celle-ci, outre les Franciscains, Mgr Elias Chacour, archevêque grec-catholique d’Haïfa, attendait les pèlerins. La Messe a été concélébrée par Mgr Vingt-Trois, Mgr Chacour et Mgr Marcuzzo dont le mot d’accueil a dessiné le rôle et le sort des chrétiens de Terre Sainte tout en invitant les chrétiens du monde entier à venir aux sources de leur foi. Lire l’homélie de Mgr Vingt-Trois.
Une réception organisée par la municipalité de Nazareth a ensuite eu lieu dans un hôtel de la ville. Le Maire est longuement intervenu, puis Madame le Consul général de France à Haïfa qui a salué le rôle des écoles catholiques francophones en Terre Sainte. Mgr Vingt-Trois a ensuite répondu à ses hôtes.

Le mercredi 14 février a été consacré à Jérusalem.
Visite à Yad-Vashem le matin, puis rencontre chez les Bénédictines du Mont des Oliviers avec la Présidente de la Caritas du Proche et du Moyen-Orient, Mme Habesch. Les pèlerins ont pu entendre le témoignage d’une volontaire de l’hôpital Saint-Louis qui apporte des soins palliatifs à des malades de toute confession et d’une volontaire de l’association juive Yad Sarah qui aide en Israël les handicapés, sans distinction, à acquérir les instruments dont ils ont besoin : cannes, fauteuils. et qui contribue par ses activités à leur socialisation.
Mgr Vingt-Trois a déjeuné ensuite au Patriarcat latin avec Mgr Fouad Twal, coadjuteur, puis il est allé saluer l’évêque grec-catholique de Jérusalem, Mgr George Bakar, un Egyptien, pradosien, qui vient d’arriver à Jérusalem. Après une visite au Kotel, Mgr Vingt-Trois s’est rendu à la Nonciature puis il est allé se recueillir au Saint-Sépulcre. Il a ensuite présidé la Messe en la basilique Sainte-Anne. Lire l’homélie de Mgr Vingt-Trois La soirée a été occupée par une visite au Consul Général de France.

Jeudi 15 février a mené le groupe à Bethléem. Le mur franchi, il a reçu un accueil chaleureux du Maire de Bethléem accompagné de ceux de Beit Jala et de Beit Sahour, sur la place de la Mangeoire. La Messe dans l’église Sainte-Catherine a été concélébrée notamment avec Mgr Fouad Tual dont le mot d’ouverture a été longuement applaudi par les pèlerins.Lire l’homélie de Mgr Vingt-Trois. Après la Messe, les pèlerins ont été reçus par les Maires des trois villes et par le curé franciscain de Bethléem. L’intervention de Mgr Vingt-Trois constituait une sorte de bilan de ce voyage. Le déjeuner a eu lieu ensuite dans différents hôtels ou restaurants de Bethléem.

Deux faits médiatiques ont marqué ce voyage. Ils méritent une explication.

1. Le lundi, à peine la conférence de presse précédant la conférence à l’université de Tel-Aviv achevée, l’AFP a expédié une dépêche disant que l’Archevêque de Paris avait déclaré : « La France est vouée à une pandémie d’antisémitisme ». Cette annonce a suscité une vive émotion. En fait, la phrase exacte de Mgr Vingt-Trois avait été : « Les communautés juives de France ont parfois le sentiment d’être traversées par une pandémie d’antisémitisme, sentiment alimenté par des événements réels ». Un rectificatif a pu être obtenu. Mgr Vingt-Trois avait aussi insisté sur le soutien que les communautés juives de France trouveraient en cas de difficulté auprès des catholiques.

2. Une dépêche diffusée par le Ministère du Tourisme a annoncé que Mgr Vingt-Trois signerait un traité avec Yad-Vashem s’engageant à soutenir des recherches communes. D’autres ont ajouté que ce traité prévoyait l’obligation pour tout pèlerinage de catholiques français de passer par Yad-Vashem. Il n’a jamais été question de signer quoi que ce soit et rien n’a été fait en ce sens. La visite à Yad-Vashem a permis une rencontre assez générale sur l’aide à apporter à la connaissance historique de la Shoah en saluant notamment les travaux très importants du P. Patrick Desbois. Il peut être bon aussi qu’elle soit un encouragement à ce que les pèlerins visitent Yad Vashem, notre lecture de l’Écriture sainte ne pouvant pas ne pas être colorée par le souvenir de la Shoah et la réflexion qu’il inspire.

3. Des chrétiens de Terre Sainte se sont inquiétés du sens de ce pèlerinage soutenu par le Ministère du Tourisme israélien et leurs inquiétudes ont trouvé des échos en France. Mais les exigences initiales posées par Mgr Vingt-Trois étaient claires et ont été respectées. Les pèlerins ont pu parcourir avec entière liberté les sites chrétiens et Mgr Vingt-Trois a pu composer son programme de rencontres à sa guise. L’accueil des autorités ecclésiales et des Franciscains dans les lieux sains a été excellent. Les pèlerins ont entendu les paroles précises de Mgr Marcuzzo et de Mgr Twal ainsi que les discours des Maires de Nazareth et de Bethléem ou de la Présidente de la Caritas. Ils ont pu passer dans le territoire sous autorité palestinienne et se rendre compte de ce que représente le mur de sécurité.

Ceci dit, l’invitation initiale venait de l’Université de Tel-Aviv et la conférence qui s’y est tenue n’était pas sans importance. Accepter l’invitation et la proposition d’y joindre un pèlerinage, c’était marquer d’une part que les relations nouées par le diocèse de Paris avec les communautés juives ne tenaient pas seulement à la personnalité du cardinal Lustiger et d’autre part que les catholiques sont conscients qu’ils ne peuvent rencontrer les communautés juives sans tenir compte de l’Etat d’Israël.

4. Concernant le mur de séparation, Mgr Vingt-Trois a tâché de tenir une position conforme à son statut d’homme d’Eglise, une position non politique mais spirituelle. Si, depuis la construction du mur, Israël ne connaît plus d’attentats, le drame principal est que le mur construit symbolise le mur intérieur, qui sépare les cœurs et les esprits et rend le dialogue toujours plus difficile. C’est pourquoi Mgr Vingt-Trois a rappelé que les murs édifiés pour protéger des peuples n’avaient jamais tenu indéfiniment : muraille de Chine, mur de Berlin. Le dialogue est donc nécessaire entre Israël et la Palestine. Des problèmes réels et très concrets se posent dont ils doivent pouvoir parler. Mais il est vain d’entretenir l’idée qu’un des partenaires va disparaître du paysage. Un rôle, modeste, que des catholiques d’autres pays peuvent jouer, c’est d’être des amis d’un côté et de l’autre, en espérant ainsi être une manière de pont : « Les amis de mes amis sont mes amis ».

La soirée académique de Tel-Aviv n’a pas été inutile. Le propos de Mgr Vingt-Trois semble avoir été bien reçu. Mais, surtout, il a paru à un certain nombre d’observateurs que le Grand Rabbin Amar ne se contentait pas de propos convenus. Il a traité des points difficiles en évoquant comment le souci de la sécurité risquait de conduire à se comporter de n’importe quelle manière, même comme on ne voudrait pas le faire. Il a insisté fortement sur le devoir d’agir selon sa ligne morale profonde. Cette soirée a reçu un certain écho dans la presse israélienne.

Un des faits marquants de ce pèlerinage a été l’excellente atmosphère qui a régné dans le groupe des pèlerins. Ceux-ci, pourtant, s’étaient inscrits, chacun de son propre mouvement. Ils venaient de diocèses et d’horizons très différents, même si une grande majorité d’entre eux sont très concrètement engagés dans la vie de communautés chrétiennes. 60% à peu près venaient en Terre Sainte pour la première fois. Ils ont su voir et entendre, et donner aux paroles entendues l’accueil qu’elles méritaient. En un temps très bref, ils ont su entrer dans la “géographie du salut” et vivre dans la prière et la célébration liturgique les mystères de la foi. On peut espérer qu’ils encourageront localement l’organisation de pèlerinages et qu’ils sauront inviter à ce que ceux-ci prennent en compte aussi bien la réalité présente d’Israël et, en particulier, la mémoire de la Shoah, que la vie et l’épreuve des communautés chrétiennes et les efforts de construction d’une Palestine.

Archevêché de Paris
6 mars 2007

Comptes-rendus