Tous les peuples, d’un seul cœur

Paris Notre-Dame du 5 décembre 2013

Pendant l’Avent, la liturgie nous plonge dans le temps de l’attente messianique. Cette année, la première lecture de chaque dimanche est extraite d’un oracle d’Isaïe. Le premier concerne le ralliement à Dieu de toutes les nations (Isaïe 2,1-5). Décryptage et témoignages.

Messe des nations à N.-D. de la Croix (20e).
© Prosper Martial

En Isaïe 2, la vision inaugurale oriente vers un temps final de salut. La montagne du temple, où le Seigneur a établi sa demeure pour y manifester sa gloire dans une stabilité immuable, devient le point de ralliement de toutes les nations qui s’interpellent à effectuer un mouvement de montée vers le sanctuaire. Attirées par la Parole du Dieu unique, elles veulent aussi célébrer à Sion l’alliance avec Dieu, comme au jour de la Pentecôte juive où est fêté par Israël le don de la Loi qui a été fait à Moïse sur le mont Sinaï. L’effet est décisif : quand Dieu est reconnu, il est tenu pour arbitre entre les peuples et les armes de guerre sont recyclées en outils agricoles pour un temps de paix. Dans le dernier verset, l’exhortation finale est adressée à la seule maison de Jacob, c’est-à-dire à Israël :par son élection, le petit peuple de Dieu prend la tête du pèlerinage et entraîne les nations étrangères pour les introduire un jour dans Jérusalem ; par sa pratique de la Loi, Israël rend en effet témoignage à Dieu devant tous les peuples. Ainsi la perspective de tout le dessein de salut se dessine. Depuis la bénédiction faite à Abraham en Gn 12,1-3, Dieu veut rassembler toute l’humanité en l’intégrant dans une descendance qui passe par l’élection de Jacob-Israël. C’est à la fin de la prophétie d’Isaïe, au chapitre 66, après des siècles de vicissitudes humaines, que se réalisera cette promesse, lorsque le Seigneur lui-même rassemblera toutes les nations sur sa montagne sainte en envoyant des messagers raconter sa gloire. Et au-delà, dans le final de l’Apocalypse, au terme de l’Écriture, la Jérusalem nouvelle descendant du ciel sera la figure achevée de cette prodigieuse annonce d’Isaïe. • P. Yvan Maréchal [1], vicaire à St-Pierre du Gros-Caillou (7e)

Et pour nous aujourd’hui

En méditant ce passage prophétique, plusieurs questions se posent aux chrétiens. Les églises et les communautés chrétiennes sont des lieux ouverts à l’accueil de toutes les nations : des hommes et des femmes de toutes langues et de toutes cultures peuvent- ils réellement s’y rencontrer et y prier sans barrières et sans préjugés ? La valeur de notre foi se vérifie grâce à notre conformité à la Parole de Dieu, à sa mise en pratique : comment notre témoignage attire-t-il à Dieu nos contemporains indifférents ou non croyants ? L’enseignement de la Parole suscite la paix entre les peuples : comment notre relation au Seigneur nous aide-t-elle à être davantage des artisans de paix entre les hommes dans nos différents lieux de vie ?

Trois questions au...
P. Benoît Gérardin, curé de St-Antoine de Padoue (15e)

P. N.-D. : Pourquoi la communauté indienne est-elle si attachée à votre paroisse ?

P. B. G. - La ville de Goa, en Inde, est un ancien comptoir portugais. Aujourd’hui, les catholiques indiens demeurent très attachés à la figure de saint Antoine de Padoue, né au Portugal. Beaucoup d’Indiens de la région parisienne viennent à notre messe d’action de grâce à saint Antoine le mardi soir. Une fois par mois, la communauté indienne se retrouve aussi pour prier dans sa langue. Le reste du temps, elle se mêle aux messes paroissiales.

Comment les Indiens sont-ils intégrés à la pastorale de St- Antoine de Padoue ?

P. B. G. - Il y a un échange réciproque entre nos communautés. La paroisse accueille actuellement un prêtre étudiant indien, de rite syro-malabar, et depuis plusieurs années, deux paroissiens indiens sont aussi membres du conseil pastoral. Ils servent de relais entre la paroisse et la communauté indienne. Celle-ci est mise à l’honneur chaque année à l’occasion de la fête patronale ou d’une messe des nations à l’Épiphanie. En février, nous partirons en pèlerinage paroissial en Inde afin de découvrir la communauté chrétienne locale et son histoire, qui remonte à l’apôtre Thomas ! Une rétrospective du périple est prévue pour la fête de fin d’année afin de faire mieux connaître ce pays aux paroissiens.

Que vous apporte cette diversité culturelle ?

P. B. G. - La communauté indienne renforce et stimule certaines de nos messes de semaine. Elle nous édifie par sa ferveur : les Indiens chantent avec beaucoup de cœur, prient devant les statues en touchant les pieds de Jésus ou la main de saint Antoine... Ils nous offrent un exemple de prière très incarnée et nous rappellent l’importance de la communion des saints. Il y a tant de façons de vénérer le Christ dans le monde ! Nos amis indiens apportent une touche supplémentaire d’universalité à la paroisse. • Propos recueillis par Agnès de Gélis

Père Manoel
© Agnès de Gélis

Témoignage
P. Manoel Costa, du diocèse de Rio Branco (Brésil), en maîtrise de théologie dogmatique à Paris.

« Je suis arrivé en France fin 2012. J’ai passé Noël à Quimper, où je rendais visite à un ami prêtre. C’était la première fois que je vivais la naissance du Christ hors de mon pays. Ce fut une expérience très riche. Même si je ne comprenais pas encore le français, je ne me sentais pas du tout étranger. J’avais plutôt l’impression d’appartenir à la même communauté. Je n’étais pas tellement dépaysé, car en France ou au Brésil, ce sont la même Parole et les mêmes gestes qui s’accomplissent à la messe. J’ai comme touché du doigt la dimension universelle de l’Église, le fait que tous les peuples viennent se rassembler autour du Christ. J’ai été très frappé de la place qui était faite aux enfants lors de cette célébration. Je ne pensais pas non plus que l’église serait aussi pleine ! En revanche, une chose m’a manqué : au Brésil, nous préparons Noël par une neuvaine, que nous récitons la dernière semaine de l’Avent avec les familles du voisinage. On vit une belle dimension communautaire. Cette année, je passerai Noël à Versailles, auprès de la communauté portugaise de Ste-Élisabeth. Je vais sûrement découvrir une autre façon de célébrer Noël. » • Propos recueillis par Agnès de Gélis

Voir toutes les initiatives sur www.paris-fete-noel.fr.

[1Auteur de Le Livre d’Isaïe ou l’expérience du salut, Éd. Parole et Silence, 2011.

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