Troisième station : Saint-Marcel

Paris Notre-Dame du 9 juillet 2020

Vite oubliés sous nos pas pressés, les noms évangéliques de certaines stations du métro parisien sont pourtant remarquables. Suite de la série d’été de Paris Notre-Dame qui grimpe, cette année, dans les rames métropolitaines, sur les traces de saints et de l’histoire chrétienne qui imprègne Paris. Troisième arrêt : Saint-Marcel.

© Priscilia de Selve

Station Saint-Marcel, ligne 5. Entre Campo Formio et Gare d’Austerlitz. Un homme de Dieu intercalé entre deux stations à la gloire de Napoléon Ier. L’histoire, ingrate, a retenu Napoléon et pas saint Marcel, neuvième évêque de Paris, qui fut pourtant en son temps un homme d’état, administrateur de la cité, autant qu’un homme de Dieu.

C’est à Venance Fortunat, évêque de Poitiers et poète du VIe siècle, que l’on doit de le connaître. Sa Vie de saint Marcel, écrite sous la forme d’un « geste, est une allégorie destinée à montrer comment cet homme issu du peuple a passé toutes les épreuves qui se présentaient à lui pour devenir pasteur et se montrer digne de cette charge », explique Didier Cauchois, membre de l’association Art, Culture et Foi/Paris. Car l’une des particularités de Marcel est d’être un homme « d’humble naissance, issu d’une famille d’artisans de l’île de la Cité », poursuit le P. Franck Souron, ancien curé de St-Marcel (13e), auteur avec le P. Jean-Christophe Vinot d’un livret sur sa vie [1].

Dans un temps où la mitre était réservée à l’aristocratie, Marcel « se rendit digne par ses œuvres de recevoir sa future dignité », écrit Venance Fortunat. Nous sommes au Ve siècle après Jésus-Christ. L’administration romaine est en déliquescence, sapée par les vagues d’invasions barbares. L’Église est minée par l’arianisme. « Marcel est issu de ce peuple parisien qu’il va former et entrainer derrière lui à travers cette période troublée qui marque la fin de l’Empire romain et le début du Moyen Âge », analyse Didier Cauchois. « C’est un pasteur qui éduque », souligne le P. Souron.

À peine sorti de l’enfance, il est attaché au clergé de la cité. Il assume ses charges avec « tant de régularité et d’édification » que « le clergé et le peuple, d’une voix unanime, l’élurent à la place du défunt évêque. » Marquant ses contemporains par ses miracles, dont celui resté fameux de son combat pour libérer une femme victime d’un dragon, il fut aussi « le protecteur de ses ouailles », souligne le P. Souron, s’opposant aux bandes armées qui rançonnaient la population, assainissant les marais de la Bièvre. Ce qui fit de lui un saint populaire, dont les reliques furent vénérées des siècles durant à Notre-Dame de Paris.

Mais à la Révolution, Marcel tomba dans l’oubli. L’église qui porte aujourd’hui son nom fut érigée boulevard de l’hôpital, sur le territoire de l’ancien faubourg Saint-Marceau. Un quartier « peuplé d’ouvriers et de prostituées » raconte le P. Benoît Strebler, actuel curé de la paroisse, « en face de ce qui fut au XVIIe siècle l’Hôpital général ». De nombreuses œuvres de charité s’y développèrent au XIXe siècle, sous la houlette de sainte Rosalie Rendu et de Frédéric Ozanam. L’église actuelle, classée au patrimoine du XXe siècle, fut édifiée dans les années 1960, après que la précédente, rongée par les termites, s’écroula en partie.

Construite sur des piliers, en prévision d’une rocade qui ne vit jamais le jour, elle se vit ajouter un nartex à l’initiative du cardinal Jean-Marie Lustiger. Construite en bois, béton et verre, elle s’inscrit parfaitement dans le paysage urbain qui l’entoure. Le P. Souron raconte volontiers comment il retrouva, quelques temps après son installation en 2009, le reliquaire de saint Marcel, remisé dans un confessionnal. Son souhait serait que celui-ci retrouve un jour la cathédrale. Pour qu’enfin saint Marcel sorte de l’ombre et reprenne sa place de saint patron de Paris, aux côtés de saint Denis et de sainte Geneviève.

Priscilia de Selve @Sarran39

Pour aller plus loin
Si les reliques de saint Marcel abritées à Notre-Dame, furent dispersées et détruites à la Révolution, la cathédrale conserve le souvenir de cet évêque : le portail Sainte-Anne sur la façade occidentale, comprend dans son trumeau, une statue du saint terrassant le dragon. Sur le flanc nord, la Porte rouge retrace dans ses voussures des épisodes de la vie de saint Marcel. Une chapelle porte également son nom, tout comme une des cloches de la cathédrale, baptisée du nom du 9e évêque de Paris en 2013.

[1Saint Marcel, évêque et patron du diocèse de Paris. Sa vie, son culte et la paroisse Saint-Marcel.

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