Une nouvelle guerre de religion ?

Paris Notre-Dame du 28 mai 2015

P. N.-D. – Pourquoi, selon vous, nous vivons actuellement une nouvelle guerre de religion ?

Mgr Luc Ravel, évêque du diocèse aux Armées.
© Agnès de Gélis

Mgr Luc Ravel – Le terme de guerre désigne une opération, qui peut prendre diverses formes et qui vise à s’emparer d’une nation ou d’un ensemble de nations. C’est bien la volonté actuelle des divers mouvements de terroristes islamistes, comme Daesh ou Boko Haram : leurs actes ont pour but de déstabiliser le niveau politique. Ils ont d’ailleurs réussi à le faire en Irak ou en Syrie. Que nous l’acceptions ou non, ils ont explicitement déclaré la guerre à nos valeurs occidentales depuis les attentats du 11 septembre 2001. Je me demande si les Français en ont vraiment pris conscience. Il s’agit d’une guerre de religion, parce que ces terroristes affirment agir au nom de Dieu. Même si, à titre personnel, nous pouvons penser qu’ils n’ont pas une bonne perception de Dieu, nous ne pouvons pas occulter que leurs actions ont des motivations religieuses.

P. N.-D. – En quoi est-ce une guerre de religion et non entre religions ?

Mgr L. R. – Parce que ce n’est pas une guerre qui oppose les religions, contrairement à ce que certains hommes politiques veulent faire croire pour justifier leur vision de la laïcité. La preuve est que ces terroristes ont tué plus de musulmans que de juifs ou de chrétiens. Par ailleurs, si cette guerre incite à multiplier les rencontres interreligieuses, c’est une bonne chose. Approfondir la connaissance réciproque permet aux croyants de constater que ce qui les sépare ne les oblige pas à se combattre. Néanmoins, ce rapprochement ne peut être la solution pour mettre fin à cette nouvelle guerre de religion car elle ne relève pas d’un problème interreligieux.

P. N.-D. – Comment les chrétiens français peuvent-ils réagir face à cette guerre ?

Mgr L. R. – Elle doit les amener à s’interroger sur les valeurs de notre société. Dans toutes les guerres, chaque camp considère qu’il se situe du côté du bien et que son adversaire se situe du côté du mal. La réalité est plus complexe. Mon devoir de pasteur est de montrer que la France, même si elle porte certaines valeurs remarquables, ne se situe pas intégralement dans le camp du bien. Car nos sociétés occidentales sont traversées par certaines idéologies, par exemple dans le domaine de l’économie et de la famille, qui ne sont pas porteuses de valeurs humanistes. D’une façon générale et universelle, l’homme n’a pas à suivre une idéologie – qu’elle relève d’une religion durcie ou d’un laïcisme – mais il doit s’attacher à la vérité du Christ. À l’intérieur de la réalité de la guerre, nous pouvons, en tant que chrétiens, contribuer à la nouvelle évangélisation, c’est-à-dire transmettre le Christ grâce à la force de notre espérance, de notre foi et de notre charité. Les idéologies résistent aux idéologies. Mais elles succombent devant la vraie foi, science de la vie et de la vie éternelle. Entrons de plain-pied dans ce choix pour la vie et nous serons les pourfendeurs silencieux, mais efficaces, de cette nouvelle guerre de religion. • Propos recueillis par Céline Marcon

 Retrouvez le texte de sa conférence de carême du 9 mars, intitulé « Une nouvelle guerre de religion ? », sur le site www.dioceseauxarmees.catholique.fr

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