Homélie du Cardinal André Vingt-Trois - Messe chez les Petites Sœurs des Pauvres en la fête de la St Joseph

Petites Soeurs des Pauvres (Paris VII)-Vendredi 19 mars 2010

Homélie du Cardinal André Vingt-Trois
 2 S 7, 4-5, 12-14.16 ; Ps 88, 2-5.27.29 ; Rm 4, 13.16-18.22 ; Mt 1, 16.18-21.24

En ce jour, nous avons présent à l’esprit la maison de Nazareth où l’enfant Jésus grandit en sagesse et en force, en étant soumis à Marie et à Joseph. Nous contemplons la « Sainte Famille », le cadre où l’humanité du Christ va prendre sa pleine dimension, où comme tout enfant juif de son temps, Jésus va apprendre les prières de chaque jour, la manière dont il faut se conduire avec les autres, et tout ce qui permet de devenir un homme adulte. Sur cette maison de Nazareth veille Joseph, celui qui en est le chef, l’époux de Marie.

En nous invitant à rendre grâce à Dieu pour la mission de Joseph, l’Église nous offre de mieux comprendre le rôle qu’il remplit auprès de Marie et de Jésus et son rôle de protecteur de toute l’Église, dont la famille de Nazareth est comme l’embryon constitué autour du Christ. Joseph est chargé de veiller sur nos maisons et sur les familles qui se réclament du Christ, qui sont comme autant d’actualisation de la Sainte Famille de Nazareth. Nous remettons à sa protection avec beaucoup de confiance chacun des membres de ces familles, et ce qu’ils essaient de vivre jour après jour pour être fidèle à l’Evangile.

Tout naturellement, Sainte Jeanne Jugan a voulu placer les maisons et les communautés des Petites Sœurs des Pauvres sous la protection de saint Joseph. Comme nous le voyons dans la vie de Jeanne Jugan, ce patronage n’est pas une protection lointaine et mystérieuse, mais un soutien certain et actif pour ceux et celles qui ont mis en lui leur confiance. Jeanne Jugan, comme d’autres fondateurs ou fondatrices, se sont appuyés sur la protection de saint Joseph en des périodes difficiles pour l’avenir de leurs maisons et ont été exaucé. Là où il n’y avait plus aucun espoir, des moyens sont providentiellement apparus pour traverser les épreuves. Dans notre culture moderne, il est précieux de montrer que l’intercession des saints n’est pas simplement une intercession morale, parfois presque irréelle, mais bien une aide concrète qui peut changer quelque chose dans notre manière de vivre.

Chaque année, dans chacune de ces maisons des Petites Sœurs des Pauvres, nous célébrons dignement la fête de Saint Joseph et nous renouvelons notre confiance en sa protection. Avec une simplicité d’enfant, nous voulons confier à sa vigilance chacun et chacune des membres de nos communautés.

Saint Joseph, protecteur des familles et des maisons dans lesquelles vivent ces familles, a été aussi proclamé protecteur de l’Église toute entière. La petite cellule de Nazareth, composée de Joseph, Marie et de l’Enfant-Jésus, n’est-elle pas comme les prémices de la grande famille de l’Église qui allait se développer à partir de la mission du Christ ? Puisque Joseph a été choisi pour veiller sur les premiers pas de cette mission, nous croyons tout naturellement qu’il continue de veiller sur elle et nous lui demandons avec foi de la protéger.

En ces temps-ci, comme au cours de l’année écoulée, nous voyons avec tristesse comment le moindre prétexte est saisi par certains pour se lancer à l’assaut de l’Église. Même si nous nous demandons comment elle peut gêner tant de monde alors qu’elle a, selon eux, si peu de forces et de puissance, elle heurte leurs idées et leurs fantasmes, et d’aucun se jettent sur elle avec ardeur. Le plus douloureux n’est pas que ces attaques viennent de ceux qui n’ont pour elle que de l’ignorance et de l’indifférence, mais qu’elles soient le fait de chrétiens qui sont membres de cette Eglise. Comme il est difficile de comprendre que l’agressivité ou la haine envers l’Eglise remplissent le cœur de certains chrétiens ! La virulence avec laquelle ils l’attaquent et la satisfaction morbide qu’ils éprouvent à se joindre à ceux qui tombent sur elle, nous touchent au cœur. Se déchirer, s’accuser et s’invectiver les uns les autres, ou pire, trouver une joie perverse dans ce jeu d’images et d’apparences, c’est briser la communion de la famille chrétienne.

Ces semaines passées, le courant d’accusations qui a traversé l’Autriche, l’Allemagne et la Hollande, n’a pas été le résultat de la simple coïncidence des événements. Il montre aussi que la publication de ces affaires a été organisée pas seulement en vue de faire apparaître la vérité (que d’ailleurs peu de gens, et certainement pas nous, auraient eu intérêt à cacher), mais surtout pour pouvoir jeter le discrédit et l’invective sur la personne du Pape, qui est à la fois le pivot de la communion de l’Église et l’image à laquelle on s’attaque avec le plus de violence.

Puisque saint Joseph est le patron de baptême du Pape – Josef Ratzinger - nous pouvons profiter de cette célébration pour prier à son intention. Que le Seigneur lui donne la force d’endurer avec patience et persévérance les coups qui sont portés dans sa direction. Qu’il ne perde pas son sens de la charité et de la foi. Que ces épreuves lui permettent au contraire de manifester encore plus clairement combien il est attaché au Seigneur et combien il vit son ministère comme un ministère de communion et de réconciliation. En priant pour lui nous prions pour toute l’Église, pour tous ses membres souffrants, blessés, attaqués et persécutés à travers le monde. Enfin, je confie aussi à votre prière la session de printemps de la Conférence des Evêques de France qui commencera lundi prochain à Lourdes. Que saint Joseph soit aussi le protecteur de ce corps épiscopal rassemblé durant quatre jours pour faire l’expérience de la fraternité, de la communion, de l’échange et du partage en travaillant sur différents dossiers. Nous sommes des hommes faibles et nous avons besoin de toute la grâce de Dieu pour résister à la tentation de jeter des projectiles pour essayer de dissocier ou de perturber la communion et l’amour que nous voyons progresser. Puissions-nous ne pas jouer notre partition personnelle sur le dos de nos confrères mais au contraire investir totalement notre capacité de travail et de présence dans une communion plus intense avec eux ! Ainsi l’image de l’Église qui transparaîtra à travers cette assemblée sera réellement capable de conforter les communautés chrétiennes et de raviver la force de la charité au sein de chacune d’entre elles.

Que la prière auprès de Notre-Dame à la Grotte, et l’eucharistie de chaque jour soient source de grâce pour nos travaux et notre vie ecclésiale !

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