Le Liban entre détresse et résilience

Paris Notre-Dame du 19 mai 2022

Du 8 au 12 mai dernier, une délégation de la Conférence des évêques de France (CEF), avec Mgr Éric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims et président de la CEF, Mgr Nicolas Brouwet, évêque de Nîmes, et Mgr Stanislas Lalanne, évêque de Pontoise, s’est rendue au Liban. Entretien avec Mgr Pascal Gollnisch, directeur général de l’Œuvre d’Orient, qui était du voyage et a participé à son élaboration.

Temps de prière sur le port de Beyrouth (Liban), devant les silos partiellement détruits qui rappellent l’explosion tragique du 4 août 2020.
© Constance du Coudert – L’Œuvre d’Orient

Paris Notre-Dame – Quel était l’objectif de la visite de la délégation de la Conférence des évêques de France (CEF) au Liban ?

Mgr Pascal Gollnisch – Le souhait des évêques était de se rendre au Liban pour réaffirmer l’amitié de l’Église de France envers le Liban en général et les catholiques libanais en particulier, mais aussi pour s’informer de la situation sur place et mesurer l’aide apportée par les catholiques de France. Au cours de ces cinq jours, nous avons pu échanger avec les quatre patriarches catholiques orientaux (maronite, melkite, syriaque et arménien) ainsi que les évêques représentant les Églises chaldéenne et latine. Il y a aussi eu des rencontres plus diplomatiques à Beyrouth, avec le nonce apostolique et l’ambassadrice de France. Nous sommes aussi allés sur le terrain, dans des écoles, des hôpitaux, des centres sociaux. L’occasion de rencontrer les populations, d’écouter les représentants des ordres religieux et des différentes communautés de frères et de sœurs qui vivent et agissent au Liban, mais aussi les jeunes volontaires français, engagés pour aider les communautés chrétiennes du pays. L’un des moments forts de ce voyage a été le temps de recueillement sur le port de Beyrouth, théâtre d’une explosion qui a dévasté la ville le 4 août 2020. Nous avons prié pour les victimes [plus de 200 morts et 6 500 blessés] que ce drame a engendré.

P. N.-D. – Quel est l’état d’esprit des gens sur place ?

P. G. – La population est très marquée par une sorte de découragement, de désespérance. Voir les représentants des évêques de France venir à leur rencontre et à leur écoute, leur redire leur amitié, compte beaucoup pour eux. Les évêques ont été impressionnés par toutes les difficultés que rencontre le pays, notamment avec la crise économique qui sévit depuis 2019 et qui a fait plonger les classes moyennes dans la misère. En plus de la détresse de la population, nous avons également pu ressentir de la fatigue et de l’usure chez certains volontaires d’ONG catholiques françaises ou de communautés religieuses qui agissent dans le pays au service de la population. Les évêques français étaient là pour apporter leur soutien à travers cette communion spirituelle. Ce temps de prière ensemble était, je crois, très important pour le moral des Libanais. Une crise est toujours terrible mais elle peut aussi révéler des qualités exceptionnelles chez certains, prêts à redresser leurs manches et agir pour donner de l’espoir et du sens. La délégation a également perçu cet esprit de résilience.

P. N.-D. – Le voyage du pape François, annoncé en juin, est finalement reporté. Qu’attendent les catholiques libanais d’une visite pontificale ?

P. G. – La venue du pape François est évidemment très attendue par les catholiques du Liban, mais ces derniers savent aussi que le Saint-Père peut parler à l’ensemble de la population, pour rappeler que les valeurs du pays du Cèdre peuvent être partagées par d’autres personnes que les chrétiens. Ces derniers doivent jouer leur rôle, au service de la population. Le tout sans craindre d’être repoussés, sans se refermer sur un petit réduit… c’est ce que les Libanais attendent du Saint-Père : redonner du sens !

Propos recueillis par Gautier Demouveaux

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